Dossier n°10912A - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Annette Pierron

Année de nomination : 2006
Date de naissance : 03/12/1911
Date de décès : //
Profession : Fermière

Camille Pierron

Année de nomination : 2006
Date de naissance : //
Date de décès : //
Profession : Fermière
    Localisation Ville : Les Mazures (08500)
    Département : Ardennes
    Région : Grand-Est

    L'histoire

    Le 5 janvier 1944, les derniers juifs du Judenlager des Mazures, dans les Ardennes françaises, sont conduits à la gare de Charleville. Sur les quais, devant des wagons à bestiaux, d’autres juifs reconnaissables à leur étoile de David vont eux aussi être transportés vers Drancy. Ce sont des juifs Ardennais, mais également des familles retirées des colonies agricoles allemandes de la WOL. Deux « Mazurois » s’enfuient sans plus attendre sous les coups de feu. Josef Peretz prend la direction de Revin où il sera sauvé par le chef de gare, Léon Devingt. Quant à Nathan Suszter, il retourne à pied dans le seul village ardennais qu’il connaisse : les Mazures. De là, il demandera à ce qu’un résistant d’Aubenton, Emile Fontaine, le prenne en charge.

    Parti en direction de Reims, le convoi s’est arrêté à la gare d’Amagne-Lucquy. Un cheminot en profite pour dégager le système de fermeture extérieure de l’un des wagons. Et quand le train, poursuivant son sinistre itinéraire, se trouve obligé de ralentir pour franchir l’Aisne, huit déportés du Judenlager des Mazures en sautent, dont : Léopold Aron, Abraham Casseres, Henri Grün, Charles et Salomon Kogel , Salomon Lemer, Harry Reicher, et David Stockfeder. Ces huit évadés n’ont eux aussi qu’un nom à la bouche pour appeler à l’aide : celui d’Emile Fontaine.
    (Mathilde Mathie-Matheu) : ce syndicaliste agricole était entré dans la Résistance en 1941 sous le pseudonyme de « Tanguy ». En 1942, il succéda à Adrien Fournaise, responsable dans son réseau de l’Organisation Civile et Militaire, hélas dénoncé et déporté sans retour. Mais lors de l’été 1943, Emile Fontaine se trouva condamné à une peine d’au moins cinq mois de travaux forcés pour « marché noir ». En vérité, ce résistant avait été arrêté par des gendarmes français alors qu’il venait de détourner des denrées alimentaires de la WOL et ce, pour ses maquis abritant des réfractaires au STO et des aviateurs alliés en transit vers l’Angleterre.
    Emile Fontaine dut accomplir sa peine au Camp des Mazures ouvert depuis le 18 juillet 1942 et construit par 288 juifs déportés depuis Anvers, en Belgique. Il y était interdit d’entrer en contact avec ces juifs, mais Emile Fontaine, avant sa propre libération, s’engagea à tout mettre en œuvre si certains d’entre eux décidaient de s’évader. Parole tenue pour Jacques Springer qui s’est sauvé des Mazures le 18 novembre 1943. Puis pour Nathan Szuster et pour huit des rescapés du convoi du 5 janvier 1944.

    Emile Fontaine est alors basé à la coopérative agricole d’Aubenton. Il tombe amoureux d’ Annette Pierron, jeune femme réfugiée chez sa mère, Camille, fermière à Buirefontaine, et Annette attend un bébé. Malgré les risques mortels courus par toute personne venant au secours des persécutés, Emile Fontaine va leur procurer des logements successifs et sécurisés ainsi que des papiers d’identité d’aryens. Par des filières fiables de la Résistance, il va soit les mettre à l’abri jusqu’à la fin de la guerre, comme Henri Grün ou leur permettre de regagner la Belgique, comme Abraham Casseres ou Harry Reicher.

    En décembre 1946, douze Anversois du Judenlager des Mazures et rescapés de la Shoah, inaugurèrent à Aubenton une plaque en hommage à Emile Fontaine, abattu hélas par la Gestapo le 30 mars 1944, mais sans lien de cause à effet avec les évadés. De ces douze Anversois, ne vivait plus que Nathan Suzster quand débutèrent en 2002 les recherches visant à arracher cette histoire à l’oubli. Il eut à cœur de témoigner pour Emile Fontaine en affirmant : « A cette époque là, j’aurais donné ma vie pour lui » ,mais sans oublier Annie et Camille Pierron, toutes deux transformant notamment la ferme de Buirefontaine en havre protecteur dans un monde où la Shoah accomplissait ses ravages.

    Mort en octobre 2004, Nathan Szuster ne connaîtra pas cette cérémonie d’hommage. Mais sa mémoire s’en trouve revivifiée tout comme celles de ses 287 camarades juifs des Mazures au nombre desquels 239 périrent comme 102 de leurs épouses et 124 de leurs enfants. Sans le courage d’Emile Fontaine, d’Annette Pierron et de Camille Pierron, cette liste de victimes de la Shoah se serait retrouvée encore plus lourde, encore plus tragique.

    Le 14 Août 2006, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné, à Monsieur Emile Fontaine ainsi qu’à Annette et Camille Pierron, le titre de Juste parmi les Nations.

    Documents annexes

    Article de presse - L'ardenne nouvelle n° 53Article de presse – L’Ardenne nouvelle n° 53
    Article de presse Article de presse
    Invitation cérémonieInvitation cérémonie

    Articles annexes




    Mis à jour il y a 8 mois.