Dossier n°2698 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Marc Boegner

Année de nomination : 1987
Date de naissance : 21/02/1881
Date de décès : 18/12/1970
Profession : Pasteur, président de la fédération protestante de France, président de la CIMADE
    Localisation Ville : Gurs (64190)
    Département : Pyrénées-Atlantiques
    Région : Nouvelle-Aquitaine

    L'histoire

    Pasteur Marc Boegner

    En mai 1941, le pasteur Marc Boegner, président de la Fédération protestante de France, fut le premier dirigeant religieux français de premier plan à condamner, clairement et officiellement, la législation antisémite du régime de Vichy. En 1940, il avait pris la tête de la CIMADE, une organisation protestante de secours qui cherchait à aider les Juifs internés dans les camps d’internement en France. En 1942, il devint président d’honneur, avec le cardinal Pierre-Marie Gerlier (q.v.) de l’association « Amitié chrétienne » créée pour aider les Juifs de France. Marc Boegner encouragea les pasteurs protestants et leurs congrégations à sauver des Juifs, et son prestige considérable donna du poids à cette prise de position courageuse. Grâce à lui, des communautés protestantes cachèrent des milliers de Juifs, surtout à Lyon, au Chambon sur Lignon et dans les départements de l’Ardèche, la Lozère, le Gard, l’Aveyron, la Drôme et le Tarn. Beaucoup d’autres Juifs réussirent à passer clandestinement en Suisse avec l’aide de pasteurs protestants, vivant dans les zones frontalières, qui avaient entendu l’appel de Marc Boegner. A partir de l’été 1941, il fut en contact étroit avec les dirigeants de Vichy – du maréchal Pétain à Xavier Vallat, commissaire général aux Affaires juives, en passant par le Président du Conseil Pierre Laval. Dans toutes ses conversations, le chef de l’église protestante condamnait la politique antisémite du régime et se battait pour l’annulation des décrets anti-juifs. Lors d’une rencontre particulièrement orageuse avec Laval en été 1942, le pasteur s’éleva avec véhémence contre la décision de déporter les enfants juifs vers les camps à l’est, dénonçant le caractère inhumain de ces mesures. Le 6 septembre de la même année, lors de la retraite annuelle au Mas Soubeyran dans le Gard, « L’assemblée du désert », il prêcha devant soixante pasteurs, les exhortant à sauver les Juifs. Cette attitude courageuse lui valait de nombreux ennemis. Dès l’été 1941, l’hebdomadaire « Au Pilori », d’un antisémite virulent, prit le pasteur pour cible et demanda qu’il soit traîné en justice. Par son action courageuse en faveur des Juifs, Marc Boegner risquait sa vie et sa liberté, tout comme les autres pasteurs protestants dont certains furent effectivement arrêtés et déportés. Il s’occupa personnellement de l’opération de sauvetage d’une centaine d’enfants juifs allemands internés au camp de Gurs dans le sud de la France. Avec le concours de plusieurs autres personnes de bonne volonté, il réussit à les cacher alors que les gendarmes s’apprêtaient à venir les emmener – destination finale Auschwitz. Les enfants eurent ainsi la vie sauve. En 1940, la famille Strauss, des Juifs français, arrivèrent à Nîmes, en zone sud, où Marc Boegner s’était installé en 1941. Lorsque la zone sud fut occupée par les Allemands, M. Strauss demanda l’aide du pasteur. Celui-ci les reçut chaleureusement et envoya la famille à Montélimar, où il leur avait trouvé une cachette. En 1943, lorsque les Strauss durent prendre une nouvelle fois la fuite, il les adressa au séminaire protestant de Collonges, en Haute-Savoie, près de la frontière suisse, où ils trouvèrent refuge jusqu’à la Libération en août 1944. Ses prises de position fermes contre la collaboration de Vichy avec l’Allemagne et pour le sauvetage des Juifs de France eurent une influence profonde sur le clergé protestant. Des milliers de Juifs lui doivent ainsi indirectement la vie.

    Le 21 juin 1988, Yad Vashem – Institut International pour la mémoire de la Shoah, a décerné au pasteur Marc Boegner le titre de Juste parmi les Nations.