Filiale de la Croix-Rouge helvétique, le Secours suisse aux enfants avait ouvert vers la fin de 1940 un home d’enfants au Château de la Hille dans l’Ariège. Sa direction fut confiée à Rose Naëf, jeune Suissesse d’une vingtaine d’années. L’œuvre se consacrait en principe à des enfants français souffrant de sous-alimentation. Le home dirigé par Rosa Naëf constituait une exception : ces 120 pupilles étaient des enfants juifs d’Allemagne recueillis avant la guerre en Belgique, puis réfugiés en France pour fuir l’occupation allemande. Sous le patronage de la Croix-Rouge suisse et la direction avisée de Rosa Naëf, les enfants du Château de la Hille jouirent jusqu’à l’été 1942 de soins dévoués, d’une bonne alimentation, dans une ambiance chaleureuse, avec un soutien affectif constant, et purent même poursuivre leur scolarité. Tout bascula le 27 août 1942, où la gendarmerie française arrêta les jeunes de 16 ans et plus. Ils furent internés au camp du Vernet, lieu de transit des convois de déportation vers les camps de la mort. Loin de se résigner, Rosa Naëf équipa de son mieux ses pupilles et alerta son supérieur, Maurice Dubois (q.v.). Elle se fit conduire en taxi au camp du Vernet, résolue à ne pas quitter les jeunes réfugiés juifs arrêtés. Grâce à l’énergique intervention à Vichy de M. Dubois, chef de la mission du Secours suisse, les adolescents purent regagner leur home, sous la houlette de leur directrice. Mais quand les Allemands occupèrent la zone sud en novembre 1942, ces jeunes se trouvèrent en grand péril. Animée par Rosa Naëf, l’équipe du Château de la Hille organisa alors leur passage en Suisse, par groupes de trois ou quatre. Munis de fausses identités et d’un pécule, les adolescents se rendaient en train à Saint-Cergues, près d’Annemasse, où la Croix-Rouge suisse gérait un autre home. Un passeur membre du personnel de cet établissement se chargeait alors de leur faire traverser la frontière. C’est ainsi que furent sauvés Margot Kern, Jacques Roth, Peter Salz et Régina Rosenblatt, qui étaient partis de la Hille en décembre 1942. Les dirigeants de la Croix-Rouge dont relevait Rosa Naëf se montrèrent contrariés par ce genre d’activités. Après avoir reçu un blâme, elle fut sanctionnée, et sous prétexte d’avoir compromis le travail en France de la Croix-Rouge suisse, relevée de ses fonctions et contrainte de regagner la Suisse.

Le 7 mai 1989, Yad Vashem a décerné à Rosa Naëf le titre de Juste parmi les Nations.

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