La famille Rouquet élevée au rang des Justes
La ville rend hommage à ces Villeneuvois qui ont secouru et abrité une famille juive pendant l’Occupation.
Durant l’Occupation, les Friedmann ont trouvé refuge au deuxième étage de cette maison appartenant alors à la famille Rouquet. (Photo « Sud Ouest »)
En ce jour marquant le 68e anniversaire de sa libération (lire ci-dessous), la commune va rendre un vibrant hommage à la famille Rouquet dont le père, Georges, la mère, Eva, et leur fille Ginette, ont tous trois été reconnus « Justes parmi les nations » (voir ci-contre). Pendant la période noire de l’Occupation, et en dépit des risques encourus, les Rouquet ont en effet secouru et hébergé clandestinement un couple de juifs réfugiés, Raymond et Marthe Friedmann, accompagné de leur enfant, Jacques, alors âgé de 10 ans.
« Ma famille a fui Paris dès l’automne 1939. On se réfugie dans un premier temps sur les rives de la Loire. Puis, suivant l’exode, nous repartons plus au sud, au-delà de ce qui sera la ligne de démarcation, et nous exilons jusqu’à Villeneuve-sur-Lot », raconte Jacques.
C’est là que les Friedmann se lient d’amitié avec la famille Rouquet. Le père, Georges, ancien garde républicain fut, à la fin des années 30, affecté au Deuxième Bureau, le service de renseignement de l’armée française. Après la défaite de 1940, il refuse de servir le régime de Vichy et quitte la gendarmerie. En 1941, il acquiert, avec son épouse Eva, une boutique de fruits et légumes, porte de Paris (là où se trouve aujourd’hui la boutique des pruneaux).
À l’automne 1943, Sam Meyer, le meilleur ami de la famille Friedmann est raflé en pleine rue de Villeneuve-sur-Lot, par la Gestapo d’Agen. Déporté à Auschwitz, il y sera gazé.
Plaque commémorative
« La situation devenait de plus en plus périlleuse. Grâce à un réseau de résistance, Ginette, la fille des Rouquet, fournit à mon père de faux papiers au nom de Pierre Fournier. Gaston Bourgeois, le principal du collège Georges-Leygues, où j’étais scolarisé en tant qu’interne, me fournit également une fausse identité. Mes parents trouvent alors refuge chez les Rouquet. Ils occupent clandestinement un petit deux pièces, situé au deuxième étage de l’immeuble qui jouxte la pharmacie, tenue à l’époque par le chef de la milice de Villeneuve-sur-Lot ! », témoigne Jacques.
Début 1944, à la suite de l’insurrection de la prison d’Eysses, l’étau se resserre encore. Il devient de plus en plus urgent de fuir la ville, où la milice renforce continuellement sa présence. Ginette Rouquet part alors en éclaireur, pour trouver à la famille Friedmann un nouveau refuge.
« Elle nous a fourni à nouveau des faux papiers et nous a aidés à rejoindre le Tarn-et-Garonne, où un ami de son père nous a cachés jusqu’à la fin de la guerre. Sans Ginette et ses parents, nous n’aurions sans doute jamais survécu à cette époque abominable », témoigne Jacques, avec une vive émotion perceptible dans la voix, près de soixante-dix ans après les faits.
L’homme, aujourd’hui âgé de 82 ans, voue une éternelle reconnaissance à ses sauveurs. C’est lui qui a entrepris les démarches pour que la famille Rouquet soit élevée au rang des Justes, et il sera ce matin présent à Villeneuve-sur-Lot pour y dévoiler la plaque commémorative, qui ornera désormais la porte de Paris.
Jérôme Souffrice
source:http://www.sudouest.fr/2012/08/20/la-famille-rouquet-elevee-au-rang-des-justes-798895-3603.php du 20/08/2012
Article lié au Dossier 10436