Dossier n°11838 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Marie-Louise Grandjean

Année de nomination : 2010
Date de naissance : 03/07/1901
Date de décès : 11/01/2001
Profession : couturière, modiste

Henri Jault

Année de nomination : 2010
Date de naissance : 06/07/1905
Date de décès : 13/03/1985
Profession : Assureur conseil
    Localisation Ville : Paris (75020)
    Département : Paris
    Région : Ile-de-France

    Lieu de mémoire

    L'histoire

    Dans le vingtième arrondissement de Paris, vivait au début de l’occupation allemande, une population industrieuse et éclectique, qui s’était implantée au fur et à mesure des flux migratoires économiques et politiques du début du siècle. C’est au 306 de la rue des Pyrénées, qu’habitaient Marie-Louise GRANDJEAN (40ans), couturière, venue de Reims pendant la Grande Guerre, Henri JAULT (37 ans), assureur originaire de Soissons ainsi qu’ Anissime et Freida GUELTZER, émigrés l’un d’Ukraine, l’autre de Roumanie pour fuir les persécutions antisémites. Au foyer de ce couple était venue au monde en 1938, une petite Suzanne.

    Les bruits de botte du nazisme, tout à la fois inquiétaient et rapprochaient ces déracinées dont les relations de voisinage étaient la plupart du temps amicales et empreintes d’une grande solidarité. Mais pour les nombreux juifs d’Europe Centrale du quartier, les rafles parisiennes de juillet 1942, dont la plus connue est celle du Vel ‘d’Hiv’, allaient bientôt mettre fin à cette relative sécurité.

    Depuis le départ de son mari, engagé volontaire dans l’armée française, puis prisonnier de guerre en Allemagne (ce qui sans doute le sauva de la mort), Freida était seule avec Suzette qui venait d’avoir quatre ans. Un soir de grande angoisse, alors que les arrestations se multipliaient, elle confia pour la nuit la garde de sa fille à ses voisins. Sans doute avait elle été saisie d’une prémonition, car au petit matin, avec une brutalité inouïe et dans un fracas assourdissant, la police fit irruption dans l’immeuble : Freida fit partie de ceux qui, poussés dans les autobus de la honte, furent internés à Drancy, puis déportés et gazés à Auschwitz.

    Réveillés en sursaut par le bruit, Marie-Louise et Henri avaient assisté impuissants au départ de leur amie. Au mépris des risques encourus, ils avaient précipitamment caché la petite Suzette derrière une baignoire où, blottie sous du linge de toilette, elle avait pu échapper miraculeusement à une mort programmée. Puis très vite, par prudence, ils gagnèrent avec elle Soissons, où se trouvait la maison de famille d’Henri.

    Les photos qui subsistent des années qui ont suivi le drame, décrivent mieux que des mots l’amour et les attentions dont fut l’objet la petite rescapée, qui n’avait pas seulement trouvé des parents, mais aussi des grands parents, des oncles, des tantes, des frères, des sœurs, des cousins … Quand à la Libération son vrai père revint de captivité, il fut, lui aussi, chaleureusement accueilli au sein de cette nombreuse famille où sa fille continua à résider pour lui permettre de pratiquer son métier d’interprète en reprenant les chemins du voyage.

    Le 27 décembre 1963, Suzette, devenue Madame Michel BAUD, était mère de deux jeunes enfants, Nathalie et Eric. Au volant de sa voiture, elle rentrait de Soissons où elle avait passé les fêtes de Noül avec sa seconde famille, lorsque dans un virage, le destin qui l’avait épargnée de justesse, la rattrapa. Elle n’avait que vingt-cinq ans. Elle repose aujourd’hui, aux côtés de Marie-Louise, sa mère de substitution, dans le cimetière de Chalifert (77), où cette dernière allait un peu plus tard finir sa vie.

    Auprès des ayants droit des JAULT et des GRANDJEAN, qui vont recevoir à titre posthume les Médailles des Justes attribuées par YAD VASHEM à leurs parents respectifs, Nathalie, la fille de Suzette, pense avec émotion à  » ceux qui ont eu le courage de prendre en charge, d’aimer et d’élever une enfant en encourant des représailles insensées ». Avec nostalgie, elle tente d’imaginer sa mère trop tôt disparue et Freida, cette grand-mère désespérée qu’elle n’a pas connue, qui dut jeter son enfant dans les seuls bras secourables qui se tendaient vers elle au moment de son départ vers la mort.

    Le 14 avril 2010, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné à Monsieur Henri Jault et à Madame Marie-Louise Grandjean, le titre de Juste parmi les Nations.

    Documents annexes

    Article de presse - Vase communiquant n°94Article de presse – Vase communiquant n°94
    Article de presse - Courrier PICARD du 27/03/2011Article de presse – Courrier PICARD du 27/03/2011
    Invitation cérémonie Jault-GrandjeanInvitation cérémonie Jault-Grandjean

    Articles annexes