Dossier n°2203 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Hélène Bindel Maugrion

Année de nomination : 1982
Date de naissance : 27/12/1895
Date de décès : 04/04/1975
Profession : secrétaire d’un industriel français

Jean Bindel

Année de nomination : 1982
Date de naissance : 16/01/1927
Date de décès : 26/12/2000
Profession :

René Bindel

Année de nomination : 1982
Date de naissance : 27/10/1895
Date de décès : 28/01/1956
Profession : Employé des Postes

Clothilde Pava

Année de nomination : 1982
Date de naissance : //
Date de décès : //
Profession : Retraitée
    Localisation Ville : Paris (75009)
    Département : Paris
    Région : Ile-de-France

    Lieu de mémoire

    L'histoire

    La famille Deutscher avait fui la Belgique en 1939 et franchi clandestinement la frontière française. Lorsque la guerre éclata, le père, Michel Deutscher, s’engagea dans l’armée française; en juin 1940 il fut fait prisonnier par les Allemands. Claire, sa femme, et Guy, son fils âgé de neuf ans, restèrent dans Paris occupé par les Allemands. Quand commencèrent les grandes rafles de Juifs, en juillet 1942, Claire Deutscher alla demander secours à un industriel français qui était en relation d’affaires avec son frère. Il refusa net. Hélène Bindel, secrétaire de la société, la vit sortir en larmes et lui proposa sans hésiter de venir habiter chez elle avec le petit Guy. Hélène et René Bindel habitaient à Ivry avec leur fils Jean, âgé de vingt ans. Leur appartement dans cette banlieue pauvre et surpeuplée du sud de Paris était exigu et sans confort. Quinze jours plus tard une meilleure solution se révéla possible. Claire fut recueillie par la tante d’Hélène, Clotilde Pava (q.v), qui habitait dans le centre de Paris, et qui la logea dans une chambre de bonne sous les combles tandis que René Bindel inscrivait Guy sous un faux nom dans un pensionnat de Vincennes. En mai 1944, René Bindel apprit que des miliciens avaient fait irruption dans l’appartement des Deutscher. Il se dit que si la famille était recherchée, mieux valait lui faire quitter la région parisienne. Il procura de faux papiers à Claire et à son fils et les fit conduire à Montreuil, dans le département de l’Aisne. Le curé du village collabora à l’opération, menée par Jean Bindel, le fils d’Hélène et René. Claire et Guy revinrent dans leur appartement à la Libération où Michel les rejoignit après la défaite allemande en 1945. Michel Deutscher a écrit dans son témoignage : « Même après la guerre, nous restions tellement attachés l’un à l’autre qu’il n’est pas exagéré de constater que Hélène et René Bindel remplaçaient pour nos enfants les grands-parents disparus dans l’Holocauste. Pour ma femme et moi ils étaient devenus plus proches que la famille. Nous nous voyions presque tous les jours, nous passions tous les dimanches et les Fêtes ensemble. »

    Le 11 janvier 1982, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné à René et Hélène Bindel et à Jean Bindel, leur fils, le titre de Juste parmi les Nations. 

    Le témoignage

    Michel Deutscher s’était enfui de Berlin six mois avant le début de la guerre avec sa femme Claire et leur petit garçon, Guy. D’abord installés en Belgique, ils passèrent illégalement en France à l’été 1939 et s’établirent à Paris. Les deux frères de Claire y vivaient depuis des années et avaient obtenu la nationalité française. Ils avaient une petite usine de recyclage de boites de conserve. Lorsque la guerre éclata, Michel Deutscher s’engagea dans l’armée française. Fait prisonnier huit mois plus tard, il fut détenu dans un stalag en Allemagne jusqu’à la fin de la guerre. Lorsque le second Statut des Juifs fut publié le 2 juin 1941, le gouvernement commença à « aryaniser » les biens et les affaires des Juifs. Les frères de Claire « vendirent » leur usine à M. Robert, leur associé français, auquel ils faisaient confiance; il était entendu que ce dernier leur rendrait leur bien lorsque le Statut serait aboli. Les deux frères avaient présenté leur soeur à M.Robert afin qu’elle puisse le contacter en cas de besoin. L’un des frères fut arrêté lors d’une rafle en août 1941, interné à Drancy, et en mars 1942, déporté à Auschwitz dont il ne devait pas revenir. Claire et son fils furent arrêtés lors de la grande rafle de juillet 1942, mais remis en liberté parce que le chef de famille était prisonnier de guerre en Allemagne. Quelques semaines plus tard, c’est l’autre frère et sa famille qui furent arrêtés. Ne sachant plus que faire, la jeune femme se tourna vers M. Robert. Il refusa de l’aider, ne voulant pas courir de risque. Elle sortit de son bureau en larmes. La secrétaire, Hélène Bindel (q.v.) la réconforta et lui offrit spontanément l’hospitalité. Claire vécut plusieurs jours avec Guy dans le petit appartement où Hélène habitait avec son mari René et son grand fils de vingt ans, Jean. Ensuite, après avoir passé deux semaines chez la mère d’Hélène, les Deutscher furent accueillis par sa tante, Clotilde Pava. Ils y vécurent jusqu’en mai 1944. Clotilde, que tout le monde appelait « Tata Pava », avait soixante-dix sept ans. Elle habitait un appartement minuscule au sixième étage d’un immeuble du 9ème arrondissement. Tandis que Guy était admis dans un pensionnat à Vincennes, elle installa Claire et son fils dans une chambre de bonne : les policiers français venus frapper à la porte de son appartement un soir s’en retournèrent bredouilles. Vers la fin de l’Occupation, rester à Paris devenait de plus en plus dangereux; les Bindel trouvèrent une nouvelle cachette pour les Deutscher dans un petit village de l’Aisne, où ils demeurèrent jusqu’à la Libération. Lorsque Michel Deutscher fut libéré après la guerre, il retrouva sa femme et son fils sains et saufs. Claire et son fils restèrent en relations avec leurs sauveteurs. « Tata Pava » s’éteignit en 1952.

    Documents annexes

    Témoignage de Romain TARDY-PANIT, Arrière-petit-fils de René et Hélène Bindel et Petit-fils de Jean Bindel Témoignage de Romain TARDY-PANIT, Arrière-petit-fils de René et Hélène Bindel et Petit-fils de Jean Bindel