Philippe Charret
Éléonore Charret
Mayer et Myriam Rotcajg ont émigré de Pologne en France en 1930. Mayer est confectionneur en pantalons pour hommes, Myriam est finisseuse. Le couple habite un petit logement rue de Belleville, à Paris. Madeleine naît à Paris en août 1931. Elle va à l’école maternelle et élémentaire. Elle parle yiddish et très vite apprend le français. A la déclaration de la guerre en septembre 1939, Mayer Rotcajg s’engage dans la Légion étrangère. Il est affecté au 21ème régiment de Marche des Volontaires Etrangers. En 1940, il est fait prisonnier et envoyé au stalag en Allemagne. Son épouse bénéficiera ainsi du statut de femme de prisonnier de guerre.
Fin juin 1941, Madeleine attrape une pleurésie. On conseille à sa mère de la mettre dans un sanatorium. Il en existe un à Villepinte, à une vingtaine de kilomètres au nord de Paris. Myriam Rotcajg connaît bien cette ville car la famille y allait régulièrement en vacances avant la guerre. Ne voulant pas mettre sa fille dans un sanatorium, elle trouve une famille pour accueillir Madeleine : Philippe et Eléonore Charret. Madeleine reste chez les Charret pendant les vacances scolaires durant l’été 1941, puis elle rentre à Paris.
Ayant eu connaissance de rumeurs de rafles imminentes, Myriam Rotcajg décide d’envoyer Madeleine chez les Charret le 14 juillet 1942, deux jours avant la grande rafle dite du « Vél d’Hiv ». Quelques jours plus tard, Madame Rotcajg demande aux Charret s’ils peuvent garder Madeleine pendant l’été au cas où il lui arriverait malheur. Madeleine fait de fréquents « allers et retours » entre Paris et Villepinte. Madeleine est alors scolarisée à l’école de son quartier à Paris. Depuis juin 1942, elle porte l’étoile juive obligatoire pour les enfants âgés de plus de six ans. Dans sa classe, elle est pratiquement la seule élève juive qui reste. Ses institutrices, Mademoiselle Courtois et Madame Lagan l’aident beaucoup dans sa scolarité.
Au 28 rue de Belleville, les Rotcajg possédaient aussi une pièce qui servait d’atelier au 4ème étage dans laquelle Myriam et sa fille dormaient pour ne pas rester dans l’appartement. Myriam avait expliqué à sa fille qu’il lui faudrait se dissimuler dans une cachette qui avait été préparée dans un placard en cas de descente de policiers. Le 3 février 1944, Myriam et sa fille ne vont pas dormir dans l’atelier. A 3 ou 4 heures du matin, elles sont brusquement réveillées par des coups dans la porte : c’est la police française. Myriam se lève, pousse sa fille dans le placard qu’elle ferme à clé. La porte de l’appartement est enfoncée, Myriam est arrêtée. Madeleine reste dans le placard pendant de longues heures quand tout à coup, la porte s’ouvre. Elle découvre la concierge qui l’envoie se refugier chez une voisine pour le restant de la nuit. Au petit matin, Madeleine brise les scellés sur la porte de l’appartement, s’habille de vêtements chauds. Elle écrit aux Charret pour leur expliquer la situation en les priant de venir la chercher. Elle se réfugie au 4ème étage dans l’atelier. Deux jours plus tard, Eléonore Charret et sa fille Suzanne viennent chercher Madeleine chez la concierge.
A Villepinte, chez les Charret, il y avait deux autres fillettes juives : Odette (6 ans) et Paulette (11 ans). Quelques semaines plus tard, Paulette quitte la maison de Villepinte pour aller rejoindre ses parents en zone Sud. Madeleine est restée chez les Charret avec la petite Odette. Madeleine est présentée comme étant la fille d’une cousine. Elle va à l’école à Villepinte et obtient son Certificat de Fin d’Etudes. Philippe et Eléonore Charret se sont occupés des deux fillettes avec beaucoup d’affection et de bienveillance. Ils ont fait l’impossible pour qu’elles ne soient pas trop tristes.
En mai 1945, Eléonore Charret vient chercher Madeleine pendant la classe et l’emmène à la maison. Un homme vêtu de l’uniforme américain attend Madeleine. Elle ne reconnaît pas son père qui venait d’être libéré des stalags allemands après cinq ans de captivité. Myriam Rotcajg ne reviendra pas d’Auschwitz Birkenau : une voisine rescapée leur a annoncé qu’elle l’avait vue à son arrivée au camp et qu’elle avait été assassinée immédiatement.
En novembre 1961, Madame Eléonore Charret est honorée par la Section locale d’Aulnay-Sous-Bois pour l’Encouragement au Dévouement où il apparait qu’elle
– a sauvé la vie de quatre petits enfants juifs en les dissimulant chez elle sous un faux nom et en subvenant bénévolement à leurs besoins.
– a ravitaillé des Juifs adultes qui étaient dissimulés dans les habitations environnantes.
– a prêté assistance à une jeune femme cachée au moment où elle mettait au monde un bébé.
Après la guerre, Madeleine a gardé le contact avec Philippe et Eléonore Charret et notamment avec leur fille Suzanne qui a le même âge qu’elle.
Le 31 janvier 2018, l’Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné le titre de Juste parmi les Nations à Monsieur Philippe Charret et à son épouse Madame Eléonore Charret.
Documents annexes
Invitation cérémonie 9 septembre 2019 16:32:28 |