Alfred Félix Chardon en 1945
Suite à l’invasion de la France par les Allemands en juin 1940, Nathan Cahen, sa femme Louise et leurs deux enfants, Pierre né en 1920 et Françoise née en 1924 quittèrent Paris et partirent vers la zone sud. En 1941, la famille décida de se séparer. Nathan et Pierre s’installèrent à Toulouse, où tous deux travaillèrent jusqu’à ce que ce dernier décide de passer en Espagne pour rejoindre les forces alliées en Afrique du Nord. Louise et Françoise allèrent à Aurillac dans le Cantal pour vivre chez un oncle.
A Aurillac, Françoise devint l’amie de Denise Canal. Les deux filles avaient le même âge et adoraient le sport. Denise présenta Françoise à ses parents, Eugène et Florinne Canal. Les Canal vivaient dans un appartement près de la gare d’Aurillac, où Eugène était le chef de gare. Il avait été blessé lors de la Première Guerre mondiale et professait sa haine des «Boches» (un nom péjoratif pour désigner les Allemands). Durant l’été 1943, une mère juive morte de peur laissa ses deux filles à la gare d’Aurillac. Eugène et Florinne emmenèrent chez eux les deux filles abandonnées et les hébergèrent jusqu’au retour de leur mère. Eugène procura aussi à Françoise et à Louise Cahen de faux papiers d’identité au nom de Calieux. Il prêta même de l’argent au père de Françoise, Pierre pour l’aider à passer en Afrique du Nord.
Denise Canal présenta ses amies juives à ses copines qu’elles rejoignaient pour des sorties et des randonnées à la campagne. Un jour les deux filles furent invitées par Lucien et Olivier Chardon, des étudiants en médecine dans la maison de campagne de leurs parents près de Vézac. La maison était très isolée et Françoise pensa que ça pourrait être une bonne cachette pour elle et sa mère en cas de danger. Elle parla de son idée à Lucien et à Olivier qui demandèrent l’autorisation à leur père Félix Chardon. Celui-ci accepta bien que le fait de cacher des femmes juives pouvait poser des problèmes à sa carrière de juge à la cour de Bordeaux.
Françoise et Louise Cahen se trouvèrent dans une situation dangereuse le 25 mai 1944, durant la dernière vague d’arrestations massives de Juifs à Aurillac. Un ami gendarme qui avait remarqué les préparatifs de la Milice et la mobilisation policière importante les prévint de la rafle qui se préparait. Les Canal hébergèrent Françoise une nuit pendant que sa mère restait cachée chez des amis. Le lendemain, ils suggérèrent que les deux fugitives aillent dans leur maison de Vézac. Cependant pour arriver à la maison, elles devaient passer un pont gardé par des forces allemandes. Prétextant que Françoise était sa fiancée, Eugène Canal lui fit passer le contrôle. Florinne passa avec Louise comme si elles étaient deux amies en promenade. Quand les deux fugitives furent installées à Vézac, Denise apporta les affaires qu’elles avaient laissées derrière elles sur sa bicyclette pour éviter tout soupçon, toujours sous l’oeil de la Milice. Françoise et Louise restèrent cachées chez les Chardon jusqu’à la Libération. Françoise et Denise restèrent de grandes amies pour la vie.
Le 16 mai 2006, l’Institut Yad Vashem Jérusalem a décerné le titre de Justes parmi les Nations à Monsieur Eugène Canal et à sa femme Madame Florinne Canal ainsi qu’à Monsieur Félix Chardon.
Documents annexes
10847A_Chardon_Alfred_presse 20 mai 2012 10:40:51 |