Trois Justes sarthois récompensés à titre posthume

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Prune Avemani pour France Bleu

Cérémonie Cormes 2

La famille Fourré à reçu la médaille et le diplôme de Justes de la nation à titre posthume © Radio France – Prune Avemani

Ils ont sauvé un bébé sous l’Allemagne nazie : trois Justes sarthois récompensés à titre posthume

À 80 ans, Catherine Haas tenait à remercier trois Corméens qui l’ont sauvée sous l’occupation allemande. Blanche, Basile et Hélène Fourré se sont occupés d’elle comme si c’était leur propre fille. Le titre de Justes parmi les nations leur a été remis à titre posthume, dimanche 24 novembre 2024.
Il suffit d’entendre les premières notes de la chanson « Göttingen » de Barbara, pour que tout le monde s’asseye dans la salle polyvalente de Cormes ce dimanche 24 novembre 2024. Tout le monde est réuni pour honorer Blanche, Basile et Hélène Fourré, trois Corméens qui ont sauvé une petite fille juive sous l’occupation allemande. Catherine Haas a aujourd’hui 80 ans, et elle souhaitait leur rentre hommage. La médaille de Justes parmi les Nations leur a été remis à titre posthume par l’institut international pour la mémoire de la Shoah, à travers la présence de leur petite fille Thérèse Le Bihan, la fille d’Hélène.

Une petite histoire dans la grande histoire

« Basile, Blanche et Hélène rejoignent aujourd’hui la grande histoire », déclare Didier Torché, le maire de Cormes. En février 1944, ils ont accueilli chez eux Catherine Haas, pour la protéger de l’Allemagne Nazie. « Blanche n’était pas très partante au début, car elle se pensait trop vieille pour s’occuper d’un nourrisson. Mais sa fille Hélène l’a convaincue et l’a aidé à s’occuper du bébé », raconte Thérèse, la fille d’Hélène. Pour elle, c’est un geste qui vient du cœur, tout simplement. « Ils n’avaient rien à y gagner, bien au contraire », souligne-t-elle. Ils risquaient sans cesse d’être attrapés par les Nazis, par la police française, ou d’être dénoncés par des voisins.

Quand la Gestapo rentrait dans la maison pour se faire à manger en utilisant la cuisine, tout le monde priait pour que le bébé ne pleure pas. « Et je ne pleurais jamais« , assure Catherine Haas, d’après ce qu’on lui a raconté. « Il devait surement y avoir un instinct de survie… quelque chose comme ça. » Jusqu’à ses 3 ans, elle a vécu dans cette famille aimante, malgré la pauvreté. « J’étais avec maman petite et papa Basile », détaille-t-elle affectueusement.

Ce père de substitution lui a même fabriqué des chaussons en peau de lapin pour éviter qu’elle n’ait froid, malgré le peu de fortune qu’ils avaient. Toute sa vie, Catherine Haas est restée en contact avec cette famille de cœur, même après avoir retrouvé sa mère, rescapée des camps. À ses 3 ans, elle n’a d’autre choix que de partir habiter avec elle à Paris, et écouter ses récits traumatisant sur ses jours sombres à Auschwitz.

Les enfants cachés de la Sarthe

Dès 1942, après la rafle du Vél-d’Hiv, de nombreux enfants de juifs parisiens ont été déplacés pour être mieux cachés. Le département de la Sarthe est le département français qui en a accueilli le plus. « Nous étions à deux heures en train de Paris, c’était rapide pour l’époque », rappelle l’historien Yves Moreau. Depuis longtemps, la Sarthe était un département d’accueil car il contenait un réseau de nourrice sarthoise qui accueillait des bébés parisiens. C’était aussi plus facile de se cacher dans la campagne profonde, et le mode de vie rural permettait d’avoir de la nourriture sans dépendance aux tickets de rationnement.

« Tout un réseau s’était mis en place. Certains Justes ont réussi à faire passer plus d’une centaine d’enfants de Paris à la Province, pour ensuite les répartir dans différentes familles pour les cacher », détaille-t-il. Tous pourtant n’ont pas eu la chance de tomber dans des familles aimantes, « certains ont été abusés ou exploités », rappelle Catherine Haas, qui en connait certain dans son entourage.

Avertir les générations futures

La cérémonie est ponctuée par des interventions d’élèves de CM1 et CM2 de l’école de Cormes. Ils se succèdent sur la scène pour lire des poèmes d’époque, sous le regard de leur institutrice Mélanie Marie. « Le sens de la cérémonie qui nous réunit ce matin, c’est de parler du passé, mais c’est surtout pour que vous puissiez contribuer demain à un monde meilleur« , rappelle le maire aux jeunes générations.

Aujourd’hui, 84 Justes parmi les nations sont reconnus dans 31 communes du département, mais ces chiffres sont provisoires. De nouveaux justes vont très prochainement être reconnus.