Article de la Nouvelle République

De g. à dr : Jacques Caen, Jacques Voisin, Pierre-Marc Daltroff , Michèle Seguev, Paul Sebaoun. (Photo NR)
Mercredi 5 mars, au Forum, Michèle Seguev (représentante d’Israël) a remis la médaille de Juste parmi les Nations, à titre posthume, à Robert Voisin, représenté par son fils Jacques, pour avoir sauvé les vies de Claire-Lise Cahen, Jacques Caen et Michel Debré pendant l’Occupation. Une reconnaissance qui fait suite aux démarches entreprises conjointement par Pierre-Marc Daltroff (fils de Claire-Lise Cahen) et du professeur Jacques Caen (1).
Étaient également présents Paul Sebaoun, délégué régional de Yad Vashem, et le sous-préfet de Loches, André Joachim.
« L’homme providentiel » a déclaré Pierre-Marc Daltroff . « Pour ma mère, le Dr Voisin a été toute sa vie durant et demeurera à tout jamais pour ses descendants que nous sommes, l’homme providentiel qui, de manière désintéressée, l’a sauvée des griffes d’un ennemi implacable »,
Réfugiée à Chinon, en danger, la famille Cahen avait décidé de se rendre en zone libre. Une infirmière à Tours connaissait une filière pour les faire passer, par l’intermédiaire d’un médecin qui emmenait les réfugiés chez un confrère à Ligueil. Ne pouvant partir ensemble dans la même voiture, par manque de place, Claire-Lise Cahen partit en premier, le 17 juillet 1942. Elle fut conduite jusqu’au cabinet du Dr Voisin. Vers 13 h, le Dr Voisin l’invitait à se rendre dans son garage et à monter sur la banquette arrière de sa Traction avant.
Après avoir roulé quelques kilomètres, puis traversé les derniers 50 mètres à pied dans un champ, Robert Voisin lui dit : Et il lui donna des instructions pour rejoindre Loches. Elle le remercia et lui tendit une enveloppe qu’il repoussa en lui disant : « Ça y est, vous êtes en zone libre, filez vite. » « Vous me remercierez une autre fois. » Et le téléphone sonna…
Puis, Jacques Caen, cousin de Claire-Lise Cahen, a témoigné à son tour. Le15 juillet 1942, il partit à vélo jusqu’à Ligueil. Et c’est aussi à vélo que le Dr Voisin l’a mené jusqu’à une ferme :
Jacques Caen put ainsi rejoindre Loches.
« Dans cette ferme que tu vas traverser, de l’autre côté, c’est la zone libre. À pied, tu t’avances, et tu ne prends que le troisième pont […] Tu vas jusqu’à un village nommé Ciran et tu récupères ton vélo dans un café à droite. »
Jacques Voisin a ensuite évoqué son père, notamment sur la façon dont il a fui à son tour. La famille était en route pour le point de passage de la ligne de démarcation lorsque Jacques, alors âgé de 2 ans, se mit à pleurer car il avait oublié son nounours. Ils firent demi-tour pour le récupérer, ce qui les retarda de quelques minutes. De retour à la barrière, le téléphone sonna et au regard du militaire, le Dr Voisin comprit qu’on allait l’arrêter et il fonça.
, raconte Jacques Voisin. « Maman disait que l’ordre avait été de l’abattre sur place »
Après la cérémonie, une plaque à la mémoire du Dr Robert Voisin a été dévoilée.
(1) Le titre de « Juste parmi les Nations » peut être décerné lorsque le témoignage d’un survivant ou des documents divers démontrent clairement qu’une personne non-juive a risqué sa vie, sa liberté et sa sécurité pour sauver un ou plusieurs juifs de la mort ou de la déportation, et ce, sans demander en contrepartie de compensation de quelque nature que ce soit