Dossier n°10695 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Hermine (Durand) Lasne

Année de nomination : 2005
Date de naissance : 08/02/1870
Date de décès : 01/09/1963
Profession : Sans profession
    Localisation Ville : Sury-Près-Léré (18240)
    Département : Cher
    Région : Centre-Val de Loire

    L'histoire

    Hermine Lasne, veuve depuis 1926, réside à Sury-près-Léré, dans le Cher, où elle a élevé ses neuf enfants. Elle garde en pension, l’été, des jeunes en difficulté. Hermine, que les habitants appellent amicalement « La Mée Lasne » en raison de ses 70 ans, se plaît parmi « ses gamins ».

    En 1940, la famille de Régine part sur les routes de l’exode, à pied, avec quelques baluchons entassés sur des charrettes. Quand la famille arrive à Sury, un important détachement de soldats allemands s’y est installé, jusqu’en février 1941.

    Hermine décide, malgré le danger, de prendre en nourrice une petite Parisienne d’origine juive, Régine Hodara, âgée de 4 ans. Des membres de sa famille la connaissent, car ils passent souvent leurs vacances à Sury-près-Léré.

    Maurice, le père de Régine, est un Juif turc ; il est représentant de commerce. Quant à sa mère, Alice, elle est de nationalité française. Elle travaille comme secrétaire dans la même entreprise que Maurice, la Compagnie des Lampes Mazda. C’est là qu’ils se sont rencontrés.

    Maurice est arrêté en novembre 1941 comme apatride et pour activité contre l’occupant. Alice tente tout pour faire libérer son mari, mais toutes ses démarches auprès du consulat de Turquie restent infructueuses. Il sera déporté à Birkenau le 19 juillet 1942 après avoir été emprisonné à la Santé, puis aux Tourelles, à Drancy…

    Hermine fait baptiser la jeune Régine pour des raisons de sécurité, même si elle-même n’allait jamais à la messe. Elle lui trouve une marraine et un parrain. Elle l’inscrit aussi à l’école et au catéchisme. Il ne s’agit nullement, de sa part, de prosélytisme religieux ; c’est bien une action délibérée pour la préserver, afin qu’elle soit traitée comme les autres enfants. À la rentrée scolaire de 1941-1942, Régine est présentée comme la petite-fille d’Hermine ; d’ailleurs, tout le village la considère comme « la petite à la Mée Lasne », que celle-ci adore « probablement plus que ses propres enfants et petits-enfants », selon le témoignage de l’un d’eux.

    Lors des bombardements, Hermine court avec Régine pour s’abriter derrière un puits et la couvre de tout son corps pour la protéger. Malgré les difficultés de ravitaillement, elle suçote de la saccharine avec son café pour laisser à Régine le sucre qu’elle possède.

    En novembre 1943, la mère de Régine, qui n’a pas été baptisée, est dénoncée et tout de suite arrêtée sur son lieu de travail. Les policiers, informés, lui demandent immédiatement : « Où est l’enfant ? ». Ils recherchent Régine. Une collègue de sa mère, Mme Mantin, vient prévenir Hermine de l’arrestation d’Alice et des poursuites lancées contre l’enfant. Elle continue pourtant à assurer sa garde, à titre gracieux, et malgré les risques encourus. Non seulement la petite est recherchée, mais aussi deux miliciens sévissent dans le village, cherchant activement à dépister ceux qui écoutent Radio-Londres, sont liés à des activités illégales ou cachent des armes. Or, l’un des petits-fils d’Hermine est FFI. En plus, l’armée allemande en retraite réquisitionne une de ses chambres pour y loger deux militaires.

    Hébergée par Hermine jusqu’à la Libération, Régine lui voue une immense reconnaissance pour lui avoir sauvé la vie, mais aussi pour lui avoir donné « parmi les plus heureuses années » de son existence. Elle a nommé sa fille « Hermine ».

     

    Elle dira dans son témoignage :

    « Pendant toutes ces années de guerre passées auprès de Mme Lasne, je ne me suis jamais considérée comme une pensionnaire envoyée à la campagne, comme beaucoup d’enfants, pour moins souffrir des rigueurs et des restrictions de la guerre. Je l’ai toujours considérée comme ma grand-mère, car elle me choyait comme sa propre petite fille. »

     

    Le 26 octobre 2005, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah – a décerné à Hermine Lasne le titre de Juste parmi les Nations.

     

     

     

     

    Articles annexes




    Mis à jour il y a 2 semaines.