Dossier n°11871 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Paul Sers

Année de nomination : 2010
Date de naissance : 06/01/1875
Date de décès : 22/10/1959
Profession : Restaurateur
    Localisation Ville : Lacaune les Bains (81230)
    Département : Tarn
    Région : Occitanie

    L'histoire

    Bérel Hirsel (Henri) Smulovicius est né à Vilnius en Lituanie en 1895. Jeune homme, il s’installe à Varsovie et devient boulanger. Il milite activement dans le parti socialiste ce qui l’oblige à s’enfuir du pays. Il traverse l’Allemagne et arrive en Palestine au début des années 1920. Il attrape la malaria et se rend à Paris y pour être soigné. En 1930, Bérel Smulovicius épouse Tema Liwerant qui était arrivée en France en 1925 grâce à un de ses frères, Israël. Tema et Hena, la soeur d’Israël, son mari Aaron Hofer et leurs quatre enfants les rejoignent bientôt.

    Après avoir perdu son premier bébé une année plus tard, Bérel et Tema Smulovicius ont une autre petite fille Louise née en décembre 1933. En 1939 naît leur fils Charly. Pour des raisons de santé, Charly est envoyé en nourrice, Monsieur et Madame Paquet, à Soisy-sous-Montmorency, près d’Enghien-les-Bains dans le département du Val-d’Oise, à environ quinze kilomètres au nord de Paris. Il ne retournera dans sa famille qu’après la Libération de la France.

    En mai 1941, Bérel Smulovicius rejoint la Résistance. En février 1942, la police française vient l’arrêter mais il n’est pas présent. La Résistance lui fournit des faux papiers d’identité sous le nom de François Maurice Muller et Bérel Smulovicius réussit à passer la ligne de démarcation, arrive en Corse où il entre dans la Résistance locale.

    En mars 1943, Aaron et Hena Hofer sont déportés à Auschwitz où ils sont assassinés. Le mari de leur fille Bella, Jules Schur avait été arrêté auparavant. Il est envoyé vers l’est et assassiné. Bella s’installe avec sa tante, Tema Smulovicius et sa cousine Louise.

    A la mi-juillet 1942, la concierge de leur immeuble les avertit d’une vague d’arrestations imminentes. C’est la rafle du « Vel d’Hiv » des 16 et 17 juillet 1942. Elle les cache dans un appartement vide de l’immeuble. Aussitôt après, les trois femmes quittent Paris en train et arrivent à Dax dans les Landes au sud-ouest de la France pour essayer de passer la ligne de démarcation grâce à un passeur que Bérel Smulovicius avait engagé et qui les attendait. A seulement quelques mètres de la ligne de démarcation, les trois femmes et d’autres réfugiés sont arrêtés par la police et envoyées dans un lieu de rassemblement installé dans le stade de Pau dans le département des Pyrénées-Atlantiques. Les prisonniers vivent dans des tentes et dorment sur de la paille. Des milliers de Juifs transitent par ce camp. On les interroge et après quelques jours ou quelques semaines, ils sont sélectionnés : un grand nombre est envoyé au camp de Gurs. D’autres sont envoyés dans d’autres endroits, des villes et des villages, où ils sont assignés à résidence. C’est le cas pour Tema Smulovicius, sa fille Louise et sa nièce Bella Schur.

    Fin septembre 1942, les trios femmes arrivent à Lacaune dans le Tarn, où quelque 650 Juifs étrangers, surtout des Polonais et des Hollandais, vivent sous surveillance parmi les 2250 habitants. Elles trouvent un hébergement chez Paul et Lise Sers. Louise Smulovicius se souvient que les Sers n’ont demandé aucun paiement pour les héberger, leur ont fourni tout ce dont elles ont besoin et les ont traitées avec respect et amitié. D’autres familles juives de Hollande ont aussi été aidées par ce couple.

    Mi-mars 1943, Paul Sers prévient Tema d’une vague d’arrestations imminentes à Lacaune, y compris les femmes qui seraient envoyées vers l’est. Il propose de les aider à s’échapper. Le  15 mars, en pleine nuit, il emmène toutes les familles juives dans les environs de Lacaune. Tous se cachent dans les fourrés à deux kilomètres de la gare qui est surveillée par les troupes allemandes. Paul Sers leur dit que le mécanicien, un Résistant, doit ralentir pour leur permettre de grimper dans le train qui va à Castres, à environ 45 kilomètres à l’ouest de Lacaune et de là vers Toulouse où ils pourraient traverser la frontière et passer en Espagne. Paul Sers leur dit qu’il doit quitter la région à cause des risques qu’il court en aidant les réfugiés à s’enfuir. Il agit ainsi au nom de la justice et de la liberté.

    Les femmes arrivent à Toulouse, continuent vers Nice où elles retrouvent des membres de leur famille. Elles prennent un bateau et arrivent en Corse où se trouve déjà Bérel Smulovicius.

    En 1947, Bella Schur se remarie avec Izraël Zylberberg et le couple a un fils André Clément Zylberberg.

    En 2007, Louise Smulovicius décide d’honorer la mémoire de ses sauveurs. Elle contacte la ville de Lacaune, reçoit les documents et les photographies qui lui permettent de trouver  Jean-Louis Sers, le petit-fils de Paul et Lise Sers. Elle se rend à Lacaune où elle trouve d’autres documents sur la période de la guerre.

     Le 28 juin 2010, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné, à Monsieur Paul Sers, le titre de Juste parmi les Nations.

    Documents annexes

    Invitation cérémonie SersInvitation cérémonie Sers