Dossier n°11876 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Année de nomination : 2010

Thérèse (Rocher) Bouchet

Année de nomination : 2010
Date de naissance : 30/01/1883
Date de décès : 09/04/1963
Profession : Nourrice
    Localisation Ville : Baule (45130)
    Département : Loiret
    Région : Centre-Val de Loire

    L'histoire

    Durant la Seconde Guerre mondiale, Thérèse Bouchet va accueillir neuf enfants, dont Monique Damsky et Albert et Régine Gradsztejn.

    En juin 1942, le bruit court qu’une grande rafle aura lieu le lendemain dans le 10ème arrondissement de Paris. Dans le 11ème et le 20ème, des centaines d’hommes avaient déjà été arrêtés, internés à Drancy ou dans les camps du Loiret et déportés vers une destination inconnue. 
    Nathan Gradsztejn, le père de Albert et Régine fit prévenir son épouse, Esther, qu’il restait dormir à l’atelier. 
    Esther, enceinte de cinq mois, est seule avec Albert et Régine, quand on frappe à la porte. Entrent trois policiers français, deux en uniforme et pèlerine et un en civil. Ne trouvant pas Nathan Gradsztejn, l’un des deux ordonne à Esther Gradsztejn d’habiller les enfants et de les suivre au commissariat. Le civil s’interpose et dit : « Non, restez, nous n’arrêtons pas encore les femmes enceintes et les enfants« .
    Alerté par cette menace, Nathan Gradsztejn cherche où cacher les enfants. Faubourg Saint-Antoine, dans l’immeuble de son frère, un couple formidable, Mr et Mme Madeline, leur trouve une famille d’accueil. Ils emmènent Albert (8 ans) et Régine (4 ans) dans la Sarthe. Ils vont y rester plus de 5 mois avant de rentrer à Paris. 
    La fille de Nathan et d’EstherIda, naît le 15 septembre 1942. Esther la garde à Paris jusqu’à ses six mois, car les bébés n’étaient pas encore déportable avant cet âge. Puis, grâce à Madame Madeline, elle sera cachée dans une ferme du Loiret. 
    Mme Madeline trouve une nouvelle cachette dans le Loiret et emmène Albert et Régine à Baule, chez Thérèse Bouchet, une pauvre femme qui accueillait neuf enfants, dans une petite maisonnette. Ils vont à l’école du village, sous le faux nom de « Paulette et Albert Gratten », mais sans être inscrits sur le registre scolaire. 

    Vers la fin novembre 1943, Madame Madeline trouve également une cachette pour Esther chez Raymonde et André Poulin, au Bardon, également dans le Loiret. Esther fait la cuisine et aide aux travaux de la ferme. Nathan tarde à la rejoindre, car il souhaite trouver le moyen de transporter une machine à coudre et un peu de tissu. afin de nourrir sa famille. Hélas, la concierge le dénonça à la Gestapo… 
    Il fut arrêté le 29 janvier 1944, puis interné au camp de Drancy d’où il envoya deux lettres à Mme Madeline, la prévenant que Esther était enceinte et lui demandant de veiller sur eux. Il fut déporté sans retour de Drancy à Auschwitz le 10 février 1944, par le convoi 68 qui transporte 1 229 personnes dont 61 enfants.

    En 1944, André Poulin emmène Esther voir ses enfants qu’elle n’avait pas vu depuis plus d’un an. André Poulin, les voyant tous affamés, revint avec un gros sac de pommes de terre et du lard qu’il donna à Thérèse Bouchet, toute heureuse de pouvoir rassasier les enfants quelques jours. 
    Un peu plus tard, André Poulin revint chercher Albert et Régine pour les ramener chez lui auprès de leur mère. André Poulin avait fourni des faux papiers à Esther au nom de « Prisca » en lui disant : « Vous pourrez dire que votre accent est un accent corse, les gens d’ici ne feront pas la différence« . 
    Lorsque Esther arriva à terme, André Poulin l’emmena en carriole, chez la sage-femme, Madame Marguerite, qui avait bien voulu l’accoucher chez elle. La petite Simone naît dans la clandestinité, le 5 juin 1944 à La Chapelle-Saint-Mesmin, tandis que les avions bombardaient la gare des Aubrais et qu’Orléans était en flammes.
    Simone fut déclarée sous le faux nom de Simone Alice Prisca.

    Le lendemain 6 juin 1944, c’était le débarquement des troupes alliées en Normandie, Orléans fut libérée au mois d’août. C’était la fête au Bardon !

    Esther et ses quatre enfants rentrent à Paris, mais ils n’ont plus rien et se retrouvent entassés à sept dont un bébé dans une pièce qui était le petit atelier de son père, Naftulé Biderman, 146 rue du Chemin Vert, sans gaz, l’eau et les cabinets sur le palier… Ils vont y rester plus de six mois, jusqu’à ce que Czarna et Naftulé Biderman récupèrent leur appartement au 3ème étage, et Esther un deux-pièces cuisine boulevard de Ménilmontant. 
    Ils vivent tous dans l’attente du retour de nos déportés. L’attente, l’espoir, les visites à l’Hôtel Lutetia où se faisait le retour des déportés.Esther attendait son mari, ses frères, son beau-frère, sa belle-sœur et ses nièces. Sa mère, Czarna Biderman portait les photos de ses fils dans son inséparable sac à main et les montrait à tout moment. « Regardez mes fils »…
    Aucun ne reviendra.

    Le 14 juillet 2010, l’Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné le titre de Juste parmi les Nations à Madame Thérèse Bouchet.

     


    1943 maison de Thérèse Bouchet régine et son frère Albert des enfants sauvés

    les enfants de l'école à la Baule

    Thérèse Bouchet en 1943 avec Monique Damsky

    Documents annexes

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    Articles annexes

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