Dossier n°12963 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Année de nomination : 2014

André Grangeon

Année de nomination : 2014
Date de naissance : 26/04/1890
Date de décès : 09/05/1970
Profession : Cultivateur

Marie (Mournetas) Grangeon

Année de nomination : 2014
Date de naissance : 28/08/1890
Date de décès : 06/05/1968
Profession : Cultivatrice
    Localisation Ville : Espartignac (19140)
    Département : Corrèze
    Région : Nouvelle-Aquitaine

    L'histoire

    Herman (Hertz) Merkin et sa femme Marjema, née Spalten, étaient originaires de Pologne. Ils sont arrivés en France en 1929. Leur fils William (Guillaume) est né à Paris le 10 avril 1929. Herman était typographe. La famille habitait à Paris dans le 20ème arrondissement.

    Le 16 Juillet 1942 (le jour de la rafle du Vel d’hiv), des policiers sont venus les arrêter chez eux, tôt le matin, mais ils étaient cachés dans le grenier. William et sa mère ont entendu les policiers frapper à la porte.  Personne n’ayant répondu, les policiers ont mis les scellés sur la porte de l’appartement et sont partis. Après cela, une voisine a crié : « Madame Merkin, vous pouvez descendre. Ils sont partis ».  Elle a ensuite proposé : « Je vais vous conduire où vous voulez ». Ils sont allés avec cette femme chez leur tante qui habitait rue Merlin, dans le 11ème arrondissement. Le père de William avait passé la nuit chez sa sœur parce que l’on arrêtait uniquement les hommes à cette époque. A peine étaient-ils arrivés chez la tante que des policiers sont venus arrêter la tante. Herman Merkin s’est énervé. Il a dit : « Nous ne sommes pas des criminels ». Il voulait ouvrir la porte, mais Marjema sa femme l’en a empêché. Les policiers ont voulu se servir d’un passe-partout qu’ils avaient, mais Herman avait réussi à bloquer la serrure. Ils ont entendu les policiers parler, disant qu’ils ne comprenaient pas pourquoi cette serrure ne pouvait pas s’ouvrir. Ils sont finalement partis en disant qu’ils reviendraient plus tard. Cinq minutes après, les Merkin étaient dans la rue où ils ont vu les policiers s’éloigner.

    Au cours de l’été 1942, William et ses parents tentent de passer en zone libre, avec un ami David Sheinberg, dont la femme et le fils avaient été arrêtés lors de la rafle du « Vél d’Hiv ». Ils partent en train jusqu’à Bourges avec deux passeurs. Arrivés à Bourges, il y a le couvre-feu, et ils ne peuvent descendre du train car de nombreux Allemands sont présents tout autour. Ils s’échappent derrière le train avec les passeurs et réussissent à se cacher dans les bois. Arrivés près de la ligne de démarcation, ils parviennent dans une grande clairière avec un groupe d’une dizaine de personnes. Il y avait des Allemands qui gardaient la clairière. Les passeurs leur ont dit que de l’autre côté, c’était la zone « libre », ajoutant : « Si l’Allemand te voit, je vais le descendre ». Il avait un revolver. L’Allemand les a certainement vus, mais il y avait trop de monde, alors il a eu peur. Il n’a rien dit et n’a pas crié. Le passeur a coupé les barbelés. La famille a pu ainsi passer en zone libre. Mais plus tard, les gendarmes arrêtent tout le groupe et leur fournissent des papiers pour entrer dans un camp en Corrèze. Avant d’arriver à Uzerche, les Merkin et les David déchirent les papiers.

    Quelques jours plus tard, alors qu’ils étaient assis dans un café, un homme leur à proposé de travailler dans une ferme isolée dans la campagne à Espartignac. C’était un conseiller municipal. Il a dit : « Est-ce que vous voulez travailler dans une ferme, vous ne serez pas payés, mais vous aurez la vie sauve. Le fermier a deux filles et pas de garçon, il a besoin d’hommes ». C’est comme ça qu’il a présenté les paysans, la famille Grangeon : André et Maria et leurs filles Marguerite et Valentine. Herman, Marjema et David ont travaillé à la ferme. William est allé à l’école pendant un an à Espartignac. Ils sont restés près de trois ans chez les Grangeon. Herman a été arrêté en février 1943 et interné dans un camp de transit. Il a réussi à sauter du train pendant son transfert à Drancy, puis à rejoindre Espartignac. Quand ils ont arrêté Herman, David a sauté d’une fenêtre et s’est caché dans les bois. Quand Herman a réussi à rejoindre la ferme, Herman et David se sont cachés dans la ferme pendant dix-huit mois. Ils travaillaient, mais pas à l’extérieur. Cependant, il y avait des espions à la solde des Allemands dans le village et des paysans voisins ont été dénoncés et déportés à Buchenwald. Un jour, un espion est venu à la ferme et a dit à Marjema et William qu’il avait des nouvelles de son mari, qu’il travaillait dans une mine de sel en Silésie. Au moment où il parlait, Herman était caché dans une cave dont la trappe était sous les pieds de l’espion. 

    Un jour en 1943, un cousin des Merkin, Paul, qui était un agent de la Résistance à Toulouse (sa tête avait été mise à prix), est venu chez les paysans chercher les Merkin. Paul était armé. Il voulait les faire partir en Espagne. André Grangeon lui a dit : « Ils sont plus en sécurité chez moi ».  Le cousin a répondu : « Tu sais ce que tu risques ? Si on trouve des juifs à la ferme, ils peuvent brûler ta ferme, tuer toute ta famille ou te déporter. »  André a répondu « Je vais prendre mes chances. Je crois qu’ils sont plus en sécurité ici que de traverser la France ».

    Les Grangeon qui ont risqué tout pour sauver la vie des Merkin, n’ont pas voulu de reconnaissance. William Merkin et ses deux fils, David et Serge ont toujours gardé des liens avec les Grangeon. Si les Merkin ont survécu à la guerre, c’est uniquement grâce à l’aide des Grangeon.

    Le 2 décembre 2014, l’Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné le titre de Justes parmi les Nations à Monsieur André Grangeon et à son épouse Madame Marie Grangeon.

     

    Documents annexes

    Invitation cérémonieInvitation cérémonie
    20 janvier 2018 17:00:01
    Article de presse - La montagne du 21/11/2016Article de presse – La montagne du 21/11/2016
    10 décembre 2016 16:25:50

    Articles annexes