Dossier n°6655 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Marie-Thérèse (Lecomte) Bazoge

Année de nomination : 1995
Date de naissance : 29/09/1910
Date de décès : //
Profession : Fermière
    Localisation Ville : Vancé (72310)
    Département : Sarthe
    Région : Pays-de-la-Loire

    L'histoire

    Les époux Pikkel, des Juifs originaires de Pologne, vivaient à Paris avec leurs deux filles, dont la plus grande était née en 1928. Ils ne furent pas inquiétés lors des grandes rafles des 16 et 17 juillet 1942, mais plusieurs des membres de la famille de Madame Pikkel, les Sotenberg, furent arrêtés et déportés. Trois d’entre eux réussirent à s’échapper et trouvèrent asile à Vance, une localité du département de la Sarthe, située sur un des affluents de la Loire. En avril 1943 Madame Pikkel et ses filles vinrent les rejoindre. Le mari, hospitalisé dans les environs de Paris, était trop malade pour entreprendre le voyage. Les réfugiés, désormais au nombre de six, vivaient dans une cabane sans eau, gaz ni électricité, dans un champ hors du village, terrifiés par le moindre bruit. Au mois de septembre de la même année, M. Pikkel, inquiet de la rumeur suivant laquelle les Allemands déportaient même les Juifs hospitalisés, s’enfuit de l’hôpital et vint rejoindre sa famille à Vance. Sept personnes se pressaient donc dans la cabane. C’est alors que la jeune Hermine Pikkel, du haut de ses quatorze ans, prit les choses en main. L’une des plus importantes familles de la localité était celle des Bazoge. La veuve Bazoge vivait dans une grande maison que les gens du village appelaient « le château »; sa jeune belle-fille, Marie-Thérèse Bazoge, elle-même veuve, habitait avec ses quatre enfants en bas-âge dans un bâtiment annexe et dirigeait la ferme. Hermine s’adressa d’abord à la vieille madame Bazoge, la priant d’aider sa famille qui se cachait dans un champ non loin des terres de la ferme. La vieille dame, craignant d’être dénoncée, commença par refuser de donner asile aux Juifs. Sans se décourager, Hermine alla voir Marie-Thérèse. Cette dernière décida, sans en référer à sa belle-mère, de donner asile aux quatre Pikkel dans le bâtiment où elle habitait; elle trouva également des refuges pour les Sotenberg. A compter de ce moment et jusqu’à la Libération, les parents Pikkel ne mirent pas le pied hors de leur cachette, de peur d’être trahis par leur fort accent étranger. Leurs deux filles travaillaient à la ferme. Madame Pikkel faisait des travaux de couture et aidait à s’occuper de la vieille madame Bazoge. Marie-Thérèse, qui était jeune et pleine d’énergie, était parfaitement consciente du risque qu’elle courait. Elle raconta dans le village que les deux filles Pikkel étaient des membres de sa famille à elle qui s’étaient sauvées de l’est de la France à cause de la présence des Allemands. Certains des habitants du village savaient que des Juifs étaient cachés dans le domaine. Toutefois, du fait de leur opposition à l’Occupation, non seulement ils ne dénoncèrent pas la jeune madame Bazoge mais encore ils l’avertissaient chaque fois qu’on prévoyait une descente allemande dans le village, lui donnant ainsi le temps de trouver des cachettes provisoires pour les réfugiés. Après la guerre, ceux-ci retournèrent à Paris, mais l’amitié née entre les Pikkel et Marie-Thérèse Bazoge se poursuivit, et après la mort des parents, les enfants gardèrent le contact.

    Le 31 juillet 1995 Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah,  a décerné à Marie-Thérèse Bazoge le titre de Juste parmi les Nations.