Dossier n°7189 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Albertine (Albert) Bonnafous

Année de nomination : 1996
Date de naissance : 02/02/1907
Date de décès : 01/04/1990
Profession : Distribution de journaux

Raoul Bonnafous

Année de nomination : 1996
Date de naissance : 19/06/1903
Date de décès : 26/11/1990
Profession : Forgeron
    Localisation Ville : Lacaune les Bains (81230)
    Département : Tarn
    Région : Occitanie

    L'histoire

    « Des saints inconscients »,

    C’est ainsi que Nadine Bonnafous décrivait ses parents, Albertine et Raoul, du village de Lacaune dans le Tarn. La famille Wachskerz – le mari, la femme et les deux enfants, des Juifs allemands – s’était réfugiée en Belgique en 1938. A l’arrivée des Allemands, ils avaient dû quitter ce pays pour la France où ils s’étaient installés à Toulouse en mai 1940. En mars 1942, les contrôles imposés aux Juifs devenant de plus en plus stricts, les Wachskerz reçurent l’ordre de partir pour Lacaune, où ils étaient assignés à résidence sous contrôle policier. Ils furent logés chez les Bonnafous. Au mois d’août de la même année la gendarmerie française commença à arrêter les Juifs de la ville – ceux qui s’y étaient installés de leur propre initiative et ceux qui, comme les Wachskerz, y avaient été envoyés. Raoul et Albertine entendirent parler des arrestations prévues la veille de l’opération, et avec l’aide de M. Vincent, le pasteur protestant de la localité, évacuèrent à la faveur de la nuit les Wachskerz, les cachant dans le clocher de l’église qui se trouvait de l’autre côté de leur cour. Peu après la gendarmerie arriva chez les Bonnafous, perquisitionna la maison, à la recherche de Juifs, et avant de repartir bredouille menaça d’arrêter le couple s’il ne dévoilait pas la cachette de leurs locataires juifs avant midi. Les Bonnafous tinrent bon. Pendant les trois semaines qui suivirent, ils allèrent porter trois repas par jour aux quatre fugitifs, passant par un accès à l’arrière de l’église. Ensuite, avec l’aide du chef de la gare de Lacaune, on organisa l’évasion des Wachskerz. Dissimulés dans d’énormes cuves à vin, ils prirent place dans le petit train reliant Lacaune à Castres. Ayant ainsi réussi à quitter la ville, ils purent survivre jusqu’à la fin de l’occupation. Les Bonnafous vinrent encore en aide à d’autres Juifs, leur assurant logement ou assistance.

    Le 10 juin 1996, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah,  a décerné à Raoul et Albertine Bonnafous, le titre de Juste parmi les Nations.

    Le témoignage

    La famille Weiler, le père, médecin, la mère, fille de rabbin, et, leurs deux filles Hanna et Rachel vivaient, à Sarrebruck en Allemagne, qui était sous administration française jusqu’en 1935. Cette année-là, un plébiscite décide de son retour en Allemagne. La France accorde sa nationalité aux Sarrois décidant de s’installer en France et permet aux médecins juifs d’ouvrir un cabinet. Avec la montée du nazisme,en 1936, les Weiler viennent s’installer à Dijon, une autre partie de leur famille résidant à Strasbourg. En 1939, le Docteur Weiler se présente comme médecin volontaire à l’Hôpital militaire de Carolue en Côte d’Or. En 1940, le père étant toujours mobilisé, Mme Weiler et ses deux filles partent retrouver leur famille à Saumur, où, elle avait été évacuée de Strasbourg. A la débâcle, ils partent vers le sud. Le Docteur Weiler est démobilisé car il n’a plus le droit d’exercer son métier (statut des Juifs). Pour vivre, il donne des cours d’anglais à Jacqueline Villaret et à l’une des filles du Pasteur Cabanis. En 1944, les Allemands occupent la zone sud. Hanna Weiler est immédiatement prise en charge et hébergée chez les parents de Jacqueline, Louis et Yvonne Villaret, et Rachel chez Henri et Adrienne Bonnafous, et ce pendant plus d’un an. Après plusieurs tentatives infructueuses de passages en Suisse ou d’embarquement pour les Etats-Unis, les parents s’adressent à l’O.S.E (Œuvre de Secours aux Enfants) et, c’est ainsi que les deux soeurs furent envoyés au couvent des Dominicaines à Monteil, Dordogne où se trouvent déjà dix autres petites filles juives. Seules, la Mère supérieure, Albert-Marie, et la directrice de l’internat sont au courant de leur identité. Les deux jeunes filles restent au couvent jusqu’en 1944.

    Cette même année, les Weiler apprennent par la mairie qu’une rafle se prépare. Effectivement, les Allemands se présentent chez eux 24 heures après mais ils sont déjà partis, aidés par le Pasteur Cabanis qui leur a trouvé une chambre dans la maison de Mme Mathilde Fabre. M. Villaret qui travaille à l’abattoir leur apporte de la viande et de la nourriture qui sont données par le Pasteur Cabanis.

    En mai 1944, les Allemands se mettent en chasse pour arrêter les enfants juifs. Il n’est donc plus question de laisser les deux soeurs Weiler au couvent. Le Pasteur Cabanis, s’occupe encore une fois de leur trouver une autre cache. Ce sera une ferme dans un village perdu des Pyrénées. Mme Villaret qui se charge de les convoyer jusqu’à Toulouse, malgré tous les risques que présente un tel voyage. Elles y restent trois mois et participent aux travaux de la ferme.