Le pasteur Brunel était à la tête de la communauté protestante de Nîmes, dans le Gard, en zone libre. Il avait 56 ans en 1940. De par sa position, il était en relations avec les fonctionnaires de Vichy, tant à la mairie qu’à la gendarmerie, et allait parfois leur rendre visite pour obtenir la remise en liberté de personnes qui avaient été arrêtées. Paul Brunel connaissait aussi nombre des Juifs de la ville. Lorsque la nature de la collaboration entre Vichy et les Allemands devint évidente, le pasteur se joignit aux activités des pasteurs protestants sous la direction de Marc Boegner (q.v.) qui venaient notamment en aide aux combattants de la résistance et aux personnes persécutées. Lorsque les Allemands occupèrent l’ensemble de la France, ce groupe redoubla d’efforts, se concentrant essentiellement sur l’aide aux Juifs. Le commandant de la Gestapo de Nîmes, qui disait publiquement qu’on ne pouvait faire confiance à un pasteur protestant, hésitait tout de même à s’attaquer Paul Brunel. Dès le début de l’occupation, ce dernier était venu en aide à la famille Kuhn, des Juifs de Paris qui avaient quitté la ville à l’approche des Allemands pour se réfugier en zone sud. Le père de famille et la fille aînée furent arrêtés en tentant de passer la ligne de démarcation. Leur sort était scellé. Madame Kuhn réussit, elle, à atteindre Nîmes avec sa fille Gisèle, 13 ans, et le petit Marcel, quatre ans. Elle demanda assistance au pasteur. Ce dernier lui trouva du travail dans une famille française comme domestique ainsi qu’un petit logement. Il plaça les deux enfants dans un orphelinat tenu par deux amies fidèles, Mademoiselle Danielle et Madame Jeanne Aigoun, plus connue sous le nom de tante Jeanne. Il expliqua aux enfants qu’ils devaient passer pour des protestants jusqu’à la fin de la guerre mais qu’ils pourraient ensuite redevenir juifs. Gisèle quitta un jour l’orphelinat pour tenter de voir sa mère; arrêtée par la police elle fut envoyée à Drancy, et de là dans un camp de concentration au nord de l’Allemagne. Les Américains libérèrent le camp le jour où l’adolescente devait être envoyée à la mort. Après une courte période de convalescence en Suède, Gisèle rentra à Nîmes pour retrouver sa famille et son sauveteur. Marcel, qui était encore trop petit pour comprendre, ne commença à réfléchir sur la guerre et celui qui lui avait sauvé la vie que bien plus tard, lorsqu’il eut fondé son propre foyer. Il partit à Nîmes rencontrer le pasteur Brunel avec lequel il resta en contact pendant de nombreuses années.

Le 5 janvier 1984, l’institut Yad Vashem Jérusalem a décerné au pasteur Paul Brunel et à sa femme le titre de Juste parmi les Nations.

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