Dans le courant du mois de novembre 1943, Marcel Billières devint directeur de l’Hôpital Mixte de Tarbes (Hautes-Pyrénées), établissement dirigé par les Soeurs de la Charité. L’endroit servait de refuge clandestin aux persécutés. Billières vint ainsi en aide à des Résistants français, des guérilleros espagnols, qui, blessés en action, avaient besoin de soin et d’un asile, ainsi qu’à de nombreux Juifs cachés à l’hôpital en tant que « malades » ou employés. Joseph Beigheldrut, un Juif de Bessarabie, vivait à Lille depuis 1929; avant la guerre, il était secrétaire d’un rabbin. Mobilisé, il fut fait prisonnier par les Allemands. Il réussit à s’échapper, franchit la ligne de démarcation et après diverses tribulations arriva à Tarbes où il trouva du travail dans une tannerie. En novembre 1942 les Allemands occupèrent la ville. Un an plus tard, le 2 novembre, la police vint frapper à sa porte à huit heures du matin. Il n’était pas chez lui. A midi, un jeune voisin courut au restaurant que Beigheldrut fréquentait et l’avertit que la police avait mis les scellés sur sa porte et l’attendait, dans la rue. Joseph eut ainsi le temps de fuir. On lui conseilla de s’adresser à Anne-Marie Llobet (q.v.), la Mère supérieure de l’Hôpital Mixte, qui faisait office de directeur par interim. Elle l’accueillit chaleureusement. Il y avait alors dans cet établissement plusieurs réfugiés juifs se faisant passer pour des malades, ou, s’ils ne parlaient pas français, pour des employés muets… Quelques jours après son arrivée, il apprit qu’un nouveau directeur venait d’être nommé. Il s’agissait de Marcel Billières, fils du maire de Toulouse. Les Juifs réfugiés à l’hôpital redoutaient l’arrivée de cet homme qui jouissait de la confiance des autorités. Leurs craintes furent vite dissipées. Il se fit le défenseur de toutes les personnes persécutées réfugiées à l’hôpital. Quand il découvrit que Beigheldrut était un prisonnier de guerre évadé et l’ancien secrétaire du rabbin de Lille, il en fit immédiatement son secrétaire particulier, l’installa dans son bureau et mit à sa disposition une cellule de moine où il put vivre jusqu’à la Libération. Pendant toute cette période l’hôpital prit en charge tous les besoins de ses hôtes clandestins – nourriture, blanchisserie, logement et, par-dessus tout – protection. La famille Cywiakowski – père, mère et trois enfants réfugiés d’Allemagne – trouva aussi refuge auprès de Billières. La mère fut engagée comme « infirmière » et chargée de s’occuper des Résistants; le père fit office d’aide-soignant. Compte tenu des risques, les enfants furent séparés de leurs parents et cachés par l’OSE, l’Oeuvre de Secours aux Enfants. Tout cela se passait au nez et à la barbe des Allemands. Le commandant local de la Gestapo venait voir tous les matins s’il y avait de nouveaux malades. Billières fut interrogé plusieurs fois à propos de membres de la Résistance blessés repérés à l’hôpital mais s’en sortit à chaque fois. L’établissement servait aussi de dépôt d’armes et de munitions pour le réseau local de Résistance. Quelques années après la guerre Marcel Billières fut élu maire de Tarbes; nombre de Juifs qu’il avait sauvés restèrent en contact avec lui.
Le 6 février 1986, Yad Vashem a décerné à Marcel Billières le titre de Juste des Nations.
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