Majer Landau et son épouse, des Juifs polonais, avaient émigré en France dans les annés vingt; ils avaient une fille, Sylvie, née en France. En octobre 1942 la famille vivait à Palavas-les-Flots (Hérault). Un mois plus tard, les Allemands, qui venaient d’occuper le sud de la France, expulsèrent de la région côtière tous les étrangers, désormais tenus d’habiter à au moins quatre-vingt kilomètres de la côte. Cherchant un logement pour sa famille, Majer arriva à huit heures du soir en autocar à St. Germain de Calberte (Lozère), où il ne connaissait personne. Un inconnu l’accosta : « Mon frère, avez-vous besoin d’aide? ». C’était Paul Tinel, le tailleur du village, qui était officier dans l’Armée du salut. Majer lui dit qu’il était Juif mais Paul répliqua : « Venez chez nous, nous trouverons quelque chose pour vous et votre famille ». C’est ainsi que Paul Tinel et sa soeur Annie prirent en charge les Landau. Lorsque Majer revint au village avec sa femme et sa fille, une maisonnette luisante de propreté les attendait. Le lendemain, ils trouvèrent un panier de victuailles sur le seuil, avec un mot du boulanger : « Déposez-nous vos cartes d’alimentation et vous pourrez acheter autant de pain que vous le souhaitez, chaque jour. » La maison appartenait à Paul Tinel; l’électricité provenait par cable de la maison de deux vieilles dames, des soeurs, qui habitaient tout près. Majer Landau trouva un emploi de bûcheron; Mme Landau, qui était sage-femme fut la bienvenue au village. Quant à Sylvie, devenue « Landaux » sur sa carte d’alimentation, elle fréquenta l’école communale. Au printemps de l’année 1943, un gendarme qui connaissait la famille car Mme Landau avait mis au monde ses enfants, vint les avertir que tous les réfugiés du village allaient être arrêtés. Le couple Landau quitta aussitôt St-Germain de Calberte, confiant Sylvie au pasteur Gaston-Charles Martin (q.v.). Dans son témoignage après la guerre, Sylvie raconte que Paul Tinel le tailleur, Charles-Gaston Martin le pasteur et Morgues l’instituteur avaient rivalisé d’efforts pour l’aider. Paul et Annie Tinel finirent pas donner leurs propres papiers à M. et Mme Landau pour leur permettre de se déplacer, et ils se réfugièrent à Grenoble, en zone italienne. Cependant, Sylvie, qui avait alors onze ans, réclamait sa mère et le tailleur prit le risque de l’emmener à Grenoble, la présentant comme sa nièce. Mme Landau faillit être arrêtée un jour : le policier qui contrôlait ses papiers connaissait Annie Tinel, et s’écria : « Mon Dieu, Annie, comme tu as changé! » s’exclama-t-il. Heureusement, la sage-femme qui avait vécu un an et demi au village et y connaissait tout le monde, sut déjouer ses soupçons. Pourtant son mari et elle avaient été à deux doigts du désastre.

Le 30 août 1988, Yad Vashem a décerné à Paul et Annie Tinel le titre de Juste parmi les Nations. 

Documents annexes

Aucun document