En août 1940, le jeune journaliste américain Varian Fry arriva à Marseille pour le compte de l’organisation américaine Emergency Rescue Committee. Il était chargé d’une mission humanitaire : retrouver deux cent réfugiés célèbres – hommes politiques, artistes, savants – qui, après s’être enfuis de l’Allemagne nazie et d’autres pays occupés, avaient trouvé provisoirement refuge dans le sud de la France. Il devait les faire sortir du pays en leur octroyant des visas pour les Etats-Unis. Or, dans le cadre des accords d’armistice entre la France et l’Allemagne, les autorités de Vichy s’étaient engagées à remettre aux Allemands tous les réfugiés anti-nazis : il était donc urgent d’agir avant que le gouvernement de Vichy n’ait eu le temps de les livrer. Varian Fry arriva à Marseille muni, en tout et pour tout, d’un permis de séjour valable trois mois, d’une liste de deux cent réfugiés répondant aux critères retenus et de la somme de 3 000 dollars. Dès le début de sa mission, la rumeur s’en répandit et bientôt des centaines de personnes se pressèrent à sa porte. Il s’aperçut rapidement que la plupart des demandeurs de visas étaient des Juifs, dont le sort était plus dramatique que celui des autres réfugiés. Toutefois, il ne pouvait rien pour eux à moins de sortir du cadre de la légalité. C’est alors que, pour pouvoir secourir le maximum de personnes, il ouvrit un bureau et engagea du personnel afin de camoufler les activités d’un autre bureau où, dans l’illégalité la plus complète, l’on fabriquait de faux passeports et de faux visas et organisait le passage de la frontière par voie de terre (le plus souvent vers l’Espagne) ou de mer avec l’aide de membres de la clandestinité. Ces activités prirent une telle envergure qu’il devint difficile de les cacher, d’autant que la police française commençait à s’intéresser à l’émissaire américain et le surveillait de près. Les autorités de Vichy protestèrent officiellement auprès du gouvernement américain qui décida du rappel de Varian Fry et envoya deux nouveaux émissaires à sa place. Toutefois, le personnel du bureau de Marseille – des Juifs pour la plupart – refusa de coopérer avec les nouveaux venus et M. Fry poursuivit son oeuvre de salut. En janvier 1941, son visa, qui avait expiré, ne fut pas renouvelé et sa présence en France devint illégale. Sans se soucier du danger permanent qui le menaçait, Varian Fry persévéra dans son action jusqu’à son expulsion huit mois plus tard, en septembre 1941. Ses services avaient traité 1 500 dossiers regroupant 4 000 personnes qui lui durent la vie. Nombre d’entre elles étaient juives. On relève les noms du peintre Marc Chagall, du sculpteur Jacques Lipschitz et des écrivains Oscar Goldberg, Herta Pauli, Hannah Arendt, Lion Feuchtwanger, Franz Werfel, pour n’en citer que quelques uns. Après son retour forcé aux Etats-Unis, Varian Fry publia des articles condamnant la politique américaine en matière d’immigration et accusant de hauts fonctionnaires du Département d’Etat de sympathie pour les régimes fascistes. Le FBI fut alors chargé d’enquêter sur ses activités mais ne trouva rien à reprocher à un homme qui avait agi par pur altruisme et pour des raisons humanitaires.
Le 21 juillet 1994, l’Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné à Varian Fry le titre de Juste parmi les Nations.
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Article de presse 7 février 2018 08:58:49 |
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