Environ deux ans avant le début de la guerre, Lucien et Denise Mazalto, des Juifs originaires de Turquie qui s’étaient installés à Bagneux (Hauts-de-Seine), se lièrent avec une famille de l’endroit, les Corbéry. La fille de ces derniers, âgée de quinze ans, s’occupait du bébé des Mazalto, Claire. Les parents pouvaient ainsi travailler dans leur teinturerie. Ce n’était pas vraiment leur métier : Denise était médecin et son mari infirmier. A la déclaration de guerre, Lucien fut mobilisé puis fait prisonnier dans les combats de mai et juin 1940. Libéré quelques mois plus tard, il trouva du travail comme infirmier dans un quartier de banlieue. Le deuxième enfant du couple, Maurice, naquit en juillet 1941. A l’été 1942, la teinturerie fut confisquée pour être « aryanisée » en vertu de la loi relative aux biens des Juifs. L’année suivante, les grands-parents Mazalto furent arrêtés avec les oncles et les tantes du jeune couple. Lucien, Denise et les deux enfants étaient menacés de déportation à leur tour. Ernest et Marie Corbéry, conscients de la situation dramatique de leurs amis, proposèrent de les héberger jusqu’à ce que le danger se dissipe. Les alentours de Bagneux étaient couverts de « jardins ouvriers » où des familles cultivaient des plantes potagères. Les Corbéry y occupaient un baraquement qui n’avait ni eau courante, ni gaz, ni électricité. Ernest, ancien combattant, invalide de la guerre de 14, ne travaillait pas; ses six enfants entretenaient la famille de leur mieux. Pour dissimuler les Mazalto aux regards des voisins, Roger Corbéry, qui avait 24 ans, creusa une petite pièce sous le baraquement et la meubla d’une table, d’un tabouret et d’un berceau pour le petit Maurice. Denise et les enfants s’y cachaient pendant la journée. Les Corbéry montaient la garde et les prévenaient quand ils pouvaient sortir respirer un peu d’air frais. Lorsque les nuits se faisaient trop fraîches, les quatre fugitifs montaient dormir sur des matelas. Ils n’avaient pas de carte d’alimentation et leurs hôtes partageient avec eux leurs maigres provisions. Ils restèrent ainsi cachés six mois, de la fin 1943 à peu avant la libération de Paris à l’été 1944. Les Corbéry refusèrent toute récompense pour avoir sauvé les Mazalto. Les deux familles restèrent très liées après la guerre.

Le 1er mai 1995, Yad Vashem a décerné à Ernest et Marie Corbéry et leur fils Roger le titre de Juste des Nations.

Documents annexes

Aucun document

Articles annexes

Aucun autre article