Bar-le-Duc : les Bernard, une famille de Justes

Accueil/La vie du Comité/Actualités/Actualités des régions/Bar-le-Duc : les Bernard, une famille de Justes

Dossier n°

12855

Bar-le-Duc : les Bernard, une famille de Justes


 

 

Le Mémorial Yad Vashem a fait des Meusiens René, Fernande et Louise Bernard des « Justes parmi les Nations ». Ils avaient sauvé Roger Gerschel en 1943 après qu’il eut sauté d’un train le conduisant à Auschwitz

René, Fernande et Louise Bernard reconnus Justes pour avoir sauve Roger Gerschel (en haut à droite)
Bar-le-Duc. « Juste parmi les Nations ». Le titre est honorifique mais ô combien symbolique. Au terme d’une longue enquête, il est décerné par le comité Yad Vashem, l’Institut Commémoratif des Martyrs et des Héros de la Shoah à Jérusalem. Il est le seul habilité à honorer des hommes et des femmes qui ont aidé des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale en leur évitant une mort certaine. Plus de 24.300 personnes ont reçu la médaille des Justes de leur vivant ou à titre posthume dont près de 3.600 Français. Parmi eux, figure désormais une famille de la banlieue de Bar-le-Duc, René Bernard, son épouse Fernande et sa mère Louise.

Le 20 novembre 1943, ils ont recueilli Roger Gerschel après qu’il a sauté d’un train le menant vers Auschwitz avec d’autres compagnons juifs d’infortune dont son frère Georges, Joseph Cajgfinger sauvé par les Meusiens Achille et Simone Domice, éclusiers de Longeville-en-Barrois et déclarés Justes en 2008, et Charles Magier, récupéré par des cheminots et amputé du pied par le docteur Royer, membre de la résistance barisienne. Ébéniste, René Bernard rentrait chez lui lorsqu’il est tombé sur Roger Gerschel, errant près du pont de Dammarie entre Longeville-en-Barrois et Bar-le-Duc. Vivant chez sa mère Louise avec sa femme Fernande, il l’a ramené chez lui sur son cadre de vélo. Même si un Allemand est installé au rez-de-chaussée, ils lui ont alors offert le gîte et le couvert, du sanglier et une truite, avant d’organiser son retour vers Chalon-sur-Saône.

« Les larmes aux yeux »

Pour cela, les noms de René, Fernande et Louise Bernard sont inscrits sur le mur du Mémorial de Yad Vashem en Israël. La décision est datée du 17 janvier 2012. À l’image de son père qui ne se vantait pas, Jean-Paul Bernard, né en 1945, est resté discret. Le 15 mars prochain, une cérémonie officielle se déroulera à Longeville-en-Barrois pour lui remettre les trois médailles de « Juste parmi les Nations ». « Lorsque j’ai reçu le courrier, j’avais les larmes aux yeux. Autodidacte, mon père était très tolérant et avec ma mère, ils ont toujours fait du bien. J’ai pensé à eux, à cet épisode qui a rythmé ma vie et que mon père a accompli naturellement en croisant Roger Gerschel. Même si la procédure ne les a pas inclus, je n’oublie pas mon oncle, Lucien, un cheminot ayant permis à Roger Gerschel de remonter dans le train, à Victor Althuser, fournisseur des faux papiers, et au docteur Royer. Auparavant, il avait opéré mon père d’une hernie fictive pour lui éviter le STO. Une chaîne de solidarité », commente Jean-Paul Bernard.

Se voir attribuer le titre de « Juste » résulte d’une longue enquête minutieuse de Yad Vashem. Témoignages, écrits, et demande initiée par des proches de la personne sauvée. À l’origine, on trouve Jean-Claude Gerschel, le fils de Roger : « Pour moi, c’était devenu naturel d’honorer les héros qui ont sauvé mon père. Je remercie L’Est Républicain qui a répercuté mon appel à témoin pour retrouver la famille Bernard dont nous avions perdu le nom. Aujourd’hui, nous sommes toujours très reconnaissants à René Bernard d’avoir sauvé mon père. Ils méritaient d’être reconnus comme Juste. Cela a pris du temps mais nous en sommes très heureux. Même s’il s’agit d’une histoire classique. Celle d’un homme qui a eu beaucoup de mérite avec quelques autres de sauter du convoi 62, et qui a beaucoup de chance de trouver sur sa route un homme comme René Bernard qui a réalisé un geste pas prémédité ».

Liés par l’histoire, les héritiers se retrouveront le 15 mars pour écrire une nouvelle page de leur histoire commune. Après 1943, René Bernard et Roger Gerschel se sont contactés occasionnellement dont une rencontre très intense en 1962. Une émission de télévision a évoqué l’histoire de l’homme à la jambe coupée. Roger Gerschel avait raconté ce qu’il devait aux Justes René, Fernande, Louise Bernard.

Sébastien GEORGES

source:http://www.estrepublicain.fr/actualite/2013/01/20/les-bernard-une-famille-de-justes du 20/01/2013