Erika Apfelbaum, la petite fille juive aux yeux bleus

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Dossier n°

12793

Erika Apfelbaum, la petite fille juive aux yeux bleus

Du 11/06/2015

 

 

Erika Apfelbaum

 

 

Erika Apfelbaum n’oubliera jamais les années sombres et le réconfort trouvé auprès des Soumoulois. 

Dimanche après-midi, Soumoulou rend hommage à Gabrielle Navailles dont les petits-enfants recevront la médaille des « Justes parmi les nations » décernée à titre posthume pour avoir aidé des juifs à se soustraire à la barbarie nazie. Conviée à la cérémonie, Erika Apfelbaum la suivra avec les yeux bleus de la petite fille de la Seconde Guerre mondiale à l’enfance mouvementée. Elle avait deux ans et demi quand ses parents furent chassés d’Allemagne où elle avait vu le jour en 1934. Sur la route de l’exil s’inscrivent Paris et la Bretagne, jusqu’à l’arrestation début 1940. « Mon père a disparu. Ma mère…

Dimanche après-midi, Soumoulou rend hommage à Gabrielle Navailles dont les petits-enfants recevront la médaille des « Justes parmi les nations » décernée à titre posthume pour avoir aidé des juifs à se soustraire à la barbarie nazie. Conviée à la cérémonie, Erika Apfelbaum la suivra avec les yeux bleus de la petite fille de la Seconde Guerre mondiale à l’enfance mouvementée.

Elle avait deux ans et demi quand ses parents furent chassés d’Allemagne où elle avait vu le jour en 1934. Sur la route de l’exil s’inscrivent Paris et la Bretagne, jusqu’à l’arrestation début 1940. « Mon père a disparu. Ma mère et moi fûmes incarcérées dans une caserne à Rennes et libérées au bout de huit jours. Revenues à Paris dans l’espoir d’avoir des nouvelles de mon père, on a appris, quelques mois plus tard, qu’il était interné au camp de Gurs. Ma mère a obtenu de la Kommandantur un sauf-conduit pour la zone libre. Elle a eu huit jours pour liquider l’ensemble de nos biens avant le départ pour Pau début 1941. »

Un témoignage poignant

Assignées à résidence à Soumoulou, elles logent chez Caperaa, « une petite auberge où nous habitions une chambre et une cuisine dotée d’une énorme cuisinière à charbon ». La mémoire a sélectionné des souvenirs d’école et de la « classe unique » de Mlle Laloye, une « excellente » personne. « Elle disait que si mes parents disparaissaient, elle m’adopterait », rapporte Erika. « Je me suis fait des copines : Rosa, Odette et Raymonde, la fille du gendarme. Toutes les filles avaient des frères dont je ne connaissais pas l’existence », raconte-t-elle. Elle se souvient aussi des allers-retours à Gurs. « Je voyais mon père d’un côté des barbelés, et nous de l’autre, mais il avait parfois la permission de sortir pour consulter un médecin à Pau ». En septembre 1944, les réfugiées s’installent à Pau, au 25, rue Palassou. « Je venais de passer mon entrée en 6e. Je fréquentais le lycée de filles. Au bout de deux ans, ma mère malade est partie se faire opérer en Angleterre, après quoi nous sommes allées vivre à Paris ». Elle y accomplira son cursus universitaire avant d’embrasser une carrière de chercheur en psychologie sociale au CNRS versée dans plusieurs domaines : conflits, mouvements de libération, théorie de la domination, femmes et lieux de pouvoir, déracinement, génocide, etc. « J’ai mené mes recherches comme je l’ai voulu. J’ai beaucoup publié en anglais », récapitule-t-elle. Une existence trépidante menée entre la France et l’Amérique du Nord l’éloignera physiquement de Soumoulou sans jamais altérer la puissance émotionnelle du passé. Elle y revint il y a 30 ans puis en octobre 2011 à l’occasion de la remise de la médaille des Justes aux bienfaiteurs de la famille du Pr René Frydman, pionnier de la fécondation in vitro ». Elle s’y singularisa par une intervention poignante de nature à raviver les liens et stimuler les échanges téléphoniques et épistolaires avec les survivants ou bien la descendance de ceux qui portèrent assistance et secours aux juifs persécutés.

Dans le droit fil de l’émouvante rencontre, elle écrira « La petite fille aux yeux bleus » après une nouvelle escapade en Béarn. Elle met aujourd’hui la dernière main à une histoire de la famille Apfelbaum au XXe siècle. « En ces temps de dérive, il est important de rappeler l’humanité des gens et les élans de solidarité », considère-t-elle pleine d’espérance.

 

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