Coutras (33) : Les Laumier, reconnus Justes parmi les nations

Accueil/La vie du Comité/Actualités/Actualités des régions/Coutras (33) : Les Laumier, reconnus Justes parmi les nations

Dossier n°

12855

Coutras (33) : Les Laumier, reconnus Justes parmi les nations

Du 07/06/2016

 

 

 

 

 

Suite à la demande des enfants Kalisz, recueillis chez eux durant la Shoah, les époux Laumier vont recevoir la plus haute distinction honorifique délivrée par l’État d’Israël. 

Denise et Lucien Kalisz étaient venus conter leur émouvante histoire, en juillet dernier, aux élèves d’Abzac. © photo archive stéphane klein
La nouvelle, venue de Jérusalem, est tombée la semaine dernière. André et Hortense Laumier, anciens habitants de la Couperie à Coutras, recevront bien, à titre posthume, la plus haute distinction honorifique de l’État d’Israël donnée à des civils. Le couple, qui avait permis de sauver trois enfants juifs durant la Seconde Guerre mondiale, sera donc fait « Juste parmi les nations ».

Une récompense, particulièrement pour les désormais vieux enfants de la famille Kalisz qui avaient été recueillis chez les époux girondins de 1942 à 1944 et qui, depuis quelques mois, se battaient pour que l’action des Laumier soit mise en lumière.

« Papa », « maman »

En juillet dernier, Lucien et Denise Kalisz, rescapés de la Shoah, étaient venus raconter leur histoire aux élèves de l’école primaire d’Abzac. Une histoire forcément poignante. En fin d’année 1942, fuyant la déportation, Lucien n’a que 2 ans, Denise 5 et Paulette 8, lorsqu’ils sont confiés par leur mère aux Laumier, le cantonnier de la Couperie et sa compagne, chez qui une partie de la fratrie avait déjà passé des vacances durant l’été 1939.

    « Mes sœurs et moi, nous restâmes chez eux, à la Couperie, jusqu’à la Libération, raconte Lucien, aujourd’hui 76 ans. Ils nous protégèrent en nous faisant passer pour leurs neveu et nièces bien que nous les appelions papa et maman (…) C’étaient des personnes discrètes et modestes avec de fortes convictions humanistes et ils nous donnèrent sans compter beaucoup d’amour. »

    Inscrits au mur d’honneur

    « Les autres habitants du hameau, qui se doutaient de nos origines, ne nous manifestèrent jamais d’hostilité et se gardèrent de dénoncer nos bienfaiteurs aux autorités de cette triste époque », retient également Lucien Kalisz. Les Laumier, chez qui Lucien et Denise sont retournés à plusieurs reprises durant leur enfance car très attachés, sont ensuite partis de Gironde pour gagner le Nord, près de la frontière belge. André y est mort en 1950 percuté par un camion, Hortense est décédée en juillet 2001 à l’âge de 94 ans.

    Aujourd’hui, Lucien Kalisz se dit très heureux de la reconnaissance accordée aux époux Laumier. « Maintenant, Yad Vashem (mémorial pour victimes juives de la Shoah, NDLR) nous demande de retrouver des descendants, de manière à organiser une cérémonie et une remise de médailles », explique celui qui doit se rendre en Charente cette semaine pour retrouver leur trace.

    Dans le courrier qui a été adressé à Lucien et Denise il y a quelques jours seulement, il est précisé que les noms d’André et d’Hortense Laumier seront inscrits sur le Mur d’honneur du Jardin des Justes de Yad Vashem, se trouvant dans la forêt de Jérusalem, sur le versant ouest du mont Herzl, au printemps ou à l’été 2017.

    Les Kalisz : une famille meurtrie

    L’histoire des Kalisz est comparable à celle de nombreuses familles juives françaises durant la Seconde Guerre mondiale. Une famille qui a été profondément déchirée et meurtrie. Des six enfants (trois nés en Pologne et trois à Paris), deux ont connu la terreur des camps : Berthe a été internée à Drancy et Fernand fut prisonnier à Buchenwald. « Il a mis plus de vingt ans avant de raconter ce qu’il a vécu là-bas », expliquait l’été dernier, à de jeunes élèves d’Abzac, son plus jeune frère Lucien.

    Le père de famille, Sana Kalisz, fut interné le 14 mai 1941 au camp de Beaune-la-Rolande (Loiret). Le motif ? Il était « en surnombre dans l’économie française. » Il y resta quatorze mois et fut déporté, sous le matricule 508, en juillet 1942, à Auschwitz où il fut gazé le jour même de son arrivée.

    À l’automne 1942, à Paris, la police frappait au domicile de la famille Kalisz pour arrêter tous ses membres. La mère, qui réussit à s’échapper, put confier aux époux Laumier ses trois plus jeunes enfants. Elle vint les récupérer à la Libération.

    JEAN-CHARLES GALIACY