En mémoire des Juifs de St-Domingue
Une étude d’Elvire Maurouard publiée aux Ed. du Cygne
Présentation des Editeurs (1) :
– « On connaît Haïti, première Rép
ublique noire, mais on ignore qu’elle fut l’un des rares pays à avoir accueilli les Juifs fuyant la répression nazie pendant la deuxième guerre mondiale. Ce n’est certainement pas un hasard. Au XVIIIe siècle, plusieurs familles juives avaient déjà choisi d’émigrer à Saint-Domingue, aujourd’hui Haïti.
Mais la nomination à Port-au-Prince du Comte d’Estaing le 27 décembre 1763 viendra semer le trouble dans les foyers juifs. Ils seront alors contraints de faire des dons pour des fondations publiques.
Dans cette étude historique, Elvire Maurouard (2) transcende les clichés pour nous décrire quelques unions interdites, celle de M. de Paz, juif accusé d’avoir envoyé les deux mulâtresses qu’il a eues avec une négresse à Bordeaux pour parfaire leur éducation.
Plusieurs échanges de courriers vont éclairer le lecteur sur le statut des Juifs à Saint-Domingue. »
Alain Guédé, Le Canard enchaîné (20 août 2008) :
– « D’Estaing, ce fou dangereux.
En ce siècle des lumières, le Code noir (3) interdisait, en principe, aux Juifs d’exercer une activité, et même de vivre, dans les colonies. La plupart des gouverneurs des « Iles du Vent » fermèrent les yeux durant des décennies, laissant les ommerçant israélites faire des affaires et contribuer à la prospérité des Antilles.
Nommé gouverneur en 1763, le brave comte d’Estaing trouva que ce laxisme coupable avait assez duré. Dans un premier temps, il estima que tolérer les Juifs aux Antilles valait bien quelques menus services, et il se mit en tête de tondre systématiquement ses sujets pas très catholiques. « Dans un pays chrétien, les Juifs doivent, pour y être tolérés, faire venir de l’eau dans les villes, fournir des bateaux aux rois et s’occuper d’autres utilités », prescrit-il alors. »
Détail d’une caricature du comte d’Estaing (DR).
« Pour d’Estaing, c’était encore insuffisant, et bientôt il promulgua un arrêté ordonnant l’expulsion de tous les Juifs de Saint-Domingue. Or ces Israélites, qui n’avaient le droit de pratiquer ni le commerce ni l’exploitation des esclaves, contribuaient, par leur activité commerçante, à la prospéfité des îles. L’idée de les voir émigrer vers les colonies britanniques sema la consternation à Versailles, au point que Choiseul, alors ministre de la Marine, traita ce brave comte d’Estaing de fou dangereux ».
Notes :
(1) Editions du Cygne : cliquer ici.
(2) Native de Haïti, Elvire Muaroard est docteur ès Lettres, master en études diplomatiques mais aussi sociétaire à la Société des poètes français.
Vivant en France, elle a publié : « L’Alchimie des rêves » (l’Harmattan), « Les beautés noires de Baudelaire » aux Editions Karthala, « Haïti, le pays hanté » (Ibis rouge). Son « Jardin de Baudelaire » a reçu le premier prix de l’Académie Internationale Il convivio.
(3) Article 1er du Code noir promulgué par Louis XIV en 1685 :
– « Voulons que l’édit du feu Roi de Glorieuse Mémoire, notre très honoré seigneur et père, du 23 avril 1615, soit exécuté dans nos îles; ce faisant, enjoignons à tous nos officiers de chasser de nos dites îles tous les juifs qui y ont établi leur résidence, auxquels, comme aux ennemis déclarés du nom chrétien, nous commandons d’en sortir dans trois mois à compter du jour de la publication des présentes… »