Il y a 70 ans, le ghetto de Varsovie se soulevait : catholiques et Juifs de Lens main dans la main
Une lugubre sirène hurle dans Varsovie. Puis, ce sont toutes les églises de la capitale polonaise qui font sonnerles cloches. Une ambiance étrange, prenante et poignante, enveloppe le monument des héros juifs de Varsovie qui, le 19 avril 1943, ont osé défier l’armée allemande les armesà la main. Un combatdu désespoir qui s’est soldé par la liquidation totale du ghetto, mais qui a été le premier signal de la révolte. L’exemple.
Soixante-dix ans plus tard, jour pour jour, les plus hautes autorités de l’État polonais saluent, remercient et honorent les Juifs polonais en présence de Kazik Ratajzer-Rotem, l’un des trois derniers combattants en vie.
Il parle en polonais devant une assistance émue et respectueuse. Dos au monument où Willy Brandt s’est agenouillé le 7 décembre 1970, il fait face au futur grand musée de l’Histoire juive en Pologne où dix siècles cette coexistence particulière seront présentés dès le mois de mai 2014. Kazik conclut son discours avec cette phrase qui déclenche les applaudissements : « Hitler a tué six millions de Juifs, mais il a perdu car je suis en vie, j’ai une épouse, des enfants et des petits-enfants… » Au premier rang des personnalités officielles, une délégation française composée de membres de l’association catholique polonaise de Lens, Millenium 2000, et de la communauté juive de Lens. Ensemble, ils travaillent au rapprochement, au dialogue et au partage de cette histoire commune.
L’émotion les étreint. Alain Tajchner, président de la communauté juive de Lens, pense à son père, né en Pologne, déporté à Auschwitz et survivant décharné ne pesant plus que 28 kilos. Sylvain Kleczewski pense à son père, né en Pologne, combattant volontaire dans l’armée française puis président de la communauté juive de Lens. Yvon Kordas, vice-président de Millenium 2000, pense à son père, né en Pologne et combattant volontaire dans l’armée Anders contre l’Allemagne.
Ils sont juifs et catholiques, ils ont des racines communes en Pologne et à Lens et les voilà de retour sur cette terre de douleur, au coeur même du ghetto.
Ils ont fait ensemble le déplacement pour être au premier rang des officiels, une étoile jaune sur la poitrine, une jonquille à la main. Leur histoire est désormais mieux connue. Le 11 septembre 2012, ils avaient organisé quatre jours de colloques, à Lens, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la rafle de Lens. Ils vont signer une convention de collaboration avec le musée de l’Histoire juive afin d’y déposer tous les éléments en leur possession, de l’arrivée des Polonais dans le Nord-Pas-de-Calais à la terrible rafle de Lens qui a fait 528 victimes.
Dimanche, Norbert et Myriam Cymbalista, qui avaient deux et sept ans le jour de la rafle, seront à Loos-en-Gohelle. Leurs parents ont été déportés et gazés. Ils ont eu la vie sauve car cachés pendant deux ans par une famille catholique polonaise, les Tysiak. Les Tysiak ont leur nom inscrit à Yad Vashem, le monument des Justes parmi les nations, à Jérusalem.
HENRI DUDZINSKI
source: http://www.lavoixdunord.fr/france-monde/il-y-a-70-ans-le-ghetto-de-varsovie-se-soulevait-ia0b0n1196920 du 23/04/2013
Article lié au Dossier 11359