Jérémy a repris le flambeau de son grand-père, survivant de la Shoah

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Dossier n°

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Jérémy a repris le flambeau de son grand-père, survivant de la Shoah

Pubkié le 16/07/2013

 

 

 

 

Jérémy (ici en 2010) entretient la flamme du souvenir de sa famille, raflée le 16 juillet 1942. Il a pris la présidence de l'association créée par son grand-père, Raymond Anisten, caché dans la Sarthe pendant la guerre.
Il prendra la parole ce mardi 16 juillet à Saint-Lô (Manche) pour évoquer la mémoire des Juifs victimes de la Shoah. En hommage à son grand-père Raymond Anisten, raflé, évadé puis caché dans la Sarthe.

« La Fredonnière et la Sarthe sont et resteront à jamais gravées dans notre coeur. » Dans la famille Anisten, la mémoire ne s’éteint pas avec les témoins. Elle se transmet et s’entretient de génération en génération.

Patricia a hérité de son papa, Raymond, décédé en octobre 2010, une reconnaissance sans borne pour la famille Landeau qui a accueilli et caché le petit garçon pendant la Seconde Guerre mondiale.

 

 

La plaque est comme toutes les plaques

Aujourd’hui, c’est Jérémy, le petit-fils, qui reprend le flambeau. Ce cadet au commissariat central de Paris XXe est le tout jeune président de l’Association nationale des enfants et petits-enfants des évadés et rescapés du Vel d’Hiv, fondée par Raymond Anisten. Il prononcera un discours, ce mardi 16 juillet, lors de la cérémonie organisée à Saint-Lô (Manche), à l’occasion de la Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français.

Mais revenons dans la Sarthe. À l’entrée du chemin qui grimpe à l’ancienne fermette des Landeau, bien cachée dans la forêt d’Ouvres, à Saint-Ouen-en-Belin, une plaque rappelle aux promeneurs qu’ici sont passés 84 enfants juifs entre 1942 et 1945. Des gamins cachés à la Fredonnière même, ou répartis dans les fermes alentours.

La plaque est comme toutes les plaques : utile mais désincarnée. Derrière elle, il y a des noms et autant de visages et d’histoires de gosses traqués, dont Raymond Anisten et son frère Bernard ont fait partie. Des histoires que Jérémy ne veut pas qu’on oublie.

16 juillet 42, 6 h du matin…

Comme pour plus de 13 000 Juifs de Paris et de sa banlieue, la vie de son « papy » bascule le 16 juillet 1942 quand, à 6 h du matin, la police tambourine à la porte des Aniksztejn, au 9, rue Henri Saint-Martin. Élie, le fils aîné, s’enfuit par le toit. Quand les agents entrent, les parents, brocanteurs, résistent. Des renforts arrivent bientôt et la famille est emmenée de force au commissariat des Lilas, puis au Vel’d’Hiv’.

« Cétait lenfer, nous avait confié Raymond Anisten, en 2010. Il y avait un bruit infernal, il faisait très chaud et lodeur était insupportable. Jai vu des gens sauter des gradins pour se suicider. Alors que je passais à côté delle, une femme ma supplié de lui trouver de leau pour son bébé. Jai réussi à en avoir un peu. Mais quand je suis revenu, son enfant ne bougeait plus. »

La Fredonnière, cachette sarthoise

Raymond et Bernard Anisten ont déjà passé plusieurs jours au Vel d’Hiv’ quand leur maman leur ordonne de tenter une évasion. Profitant d’une échauffourée provoquée par leur père et d’autres hommes, les deux garçons de 10 et 13 ans parviennent à s’évader.

Une dame les recueille et les emmène chez l’abbé Devaux qui les conduit dans la Sarthe, chez Auguste et Marie Landeau. À la ferme, c’est Colette, 17 ans, la fille du couple reconnu « Justes parmi les nations » en 2001, qui s’occupe des enfants. Une famille « de guerre » se reforme. Et jamais ces liens ne se déferont.

Plus qu’une histoire, c’est un art de vivre que Raymond Anisten a légué à ses enfants et petits-enfants. Un message que l’on pourrait résumer ainsi : portez sur le monde un regard sans haine. Mais n’oubliez jamais.

Olivier RENAULT.