« Lettres et carnets », Hans et Sophie Scholl, décapités en 1943
« La fin sera atroce, mais si terrible qu’elle doive être, elle est moins redoutable qu’une atrocité sans fin. »
Présentation par l’Editeur Tallandier :
– Le 22 février 1943, Hans (né en 1918) et Sophie Scholl (née en 1921) étaient guillotinés avec leur camarade Christoph Probst. Quelques semaines plus tard, trois autres membres de la « Rose blanche » (le professeur Kurt Huber et deux autres étudiants : Willi Graf et Alexander Schmorrel) connaissaient le même sort.
Leur crime ? Avoir peint des « Vive la liberté » dans les rues et distribué des tracts à l’université de Munich pour appeler les Allemands à la résistance en invoquant Schiller, Fichte, Lao-Tseu et Goethe, et avoir dénoncé le crime dont la culpabilité suivra à jamais le peuple allemand :
« Depuis la mainmise sur la Pologne, trois cent mille juifs de ce pays ont été abattus comme des bêtes. C’est là le crime le plus abominable perpétré contre la dignité humaine, et aucun autre dans l’histoire ne saurait leur être comparé… »
Dans diverses villes d’Allemagne, d’autres suivaient déjà leur exemple…
Idéalistes, graves mais aussi très sensibles aux joies du monde, Hans et Sophie Scholl, lui étudiant en médecine, elle étudiante en philosophie, avaient commencé par rejoindre les Jeunesses hitlériennes avec la ferveur des enfants de leur âge et un enthousiasme romantique.
Mais cette adhésion fut de courte durée. L’emprise de Hitler sur la société se renforçant, la servilité des adultes gagnant du terrain, la chape de plomb du conformisme obligé se faisant suffocante, les atrocités se multipliant, les jeunes gens sortirent de l’adolescence avec la conviction qu’ils devaient élever la voix contre un régime meurtrier.
Parsemés de commentaires sur la sinistre progression de la campagne de Hitler, ces lettres et carnets, de 1937 à 1943, mêlent les messages voilés sur le cours d’une guerre dans laquelle ils souhaitaient ardemment la défaite de leur pays et les évocations bucoliques ou les méditations sur Goethe et Dostoïevski, Claudel, Bernanos et Léon Bloy.
Les demandes aux parents alternent de même avec les apostrophes à Dieu, qu’ils ne se lassent pas d’interroger sur le mystère du mal en se nourrissant de Pascal et de saint Augustin.
De leurs notations sur les activités collectives, les travaux obligatoires pour les jeunes, le séjour de Hans au cachot, l’internement du père, les amis blessés sur le front est, se dégage une peinture rare de l’envers du décor nazi. De la lâcheté des adultes, des compromissions, des humiliations, ils ne laissaient rien échapper et ne voulaient rien laisser passer. Convaincus que Hitler vouait son peuple à la mort, ils pensaient simplement que mieux valait mourir pour la dignité et sauver l’honneur des Allemands.
Témoignage d’un itinéraire spirituel, ce recueil de lettres et de carnets intimes, de portraits, de réflexions et d’articles, est aussi un document historique hors pair sur le refus du mensonge dans l’Allemagne nazie. »
Laurent Lemire, le Nouvel Observateur (16 octobre 2008) :
– « La Rose blanche. C’est le nom qu’ils avaient donné à leur réseau de résistance au nazisme. Ils étaient jeunes, allemands et ils voulaient réveiller les consciences de leur pays en lançant Pascal ou Dostoïevski contre Hitler.
Hans, sa soeur Sophie et leur ami Christoph Probst furent décapités en 1943 à Munich. Ils avaient 24, 21 et 23 ans. De leur action, il reste ces lettres inédites et ces carnets:
« La fin sera atroce, mais si terrible qu’elle doive être, elle est moins redoutable qu’une atrocité sans fin. »
Ces Lettres et carnets de Hans et Sophie Scholl, apportent un double éclairage. D’abord, ils confirment l’existence, trop peu connue, d’un courant de résistance au sein même du IIIe Reich. Ensuite, ils constituent un témoignage bouleversant sur la formation intellectuelle et spirituelle de deux jeunes étudiants en lutte contre un régime et l’étouffement intellectuel qu’il impose. »
Laurent Larcher, La Croix (12 septembre 2008) :
Vingt-deux février 1943, Munich. Sur le mur de la cellule de Stadelheim, quelques mots griffonnés précipitamment :
« Savoir se maintenir ».
Un vers de Goethe lancé à la face de l’histoire par un jeune Allemand de 25 ans, Hans Scholl, avant d’être décapité pour « haute trahison ». Son crime ? Avoir écrit et distribué six tracts, six textes appelant ses compatriotes à se libérer du « démon du consentement », à se réapproprier « ce que l’homme possède de plus haut : le libre arbitre et la liberté ».
Ce 22 février 1943, Sophie Scholl, 22 ans, la jeune sœur de Hans, est décapitée pour la même raison. « Qu’importe ma mort si grâce à nous des milliers d’hommes ont les yeux ouverts », confiait-elle à sa compagne d’emprisonnement.
(Photo : unis dans leur résistance autour de La Rose Blanche, unis dans la mort, Hans et Sophie Scholl, DR).
Evelyne Lever, Le Figaro (26 septembre 2008) :
– « Comme tant d’autres jeunes Allemands, Hans et Sophie Scholl auraient pu marcher au pas cadencé du nazisme. Mais alors qu’ils appartiennent aux Jeunesses hitlériennes, ils prennent conscience de l’horreur du régime : ils dénoncent le règne du mensonge et les violences commises contre les juifs. Leur rencontre avec un professeur de philosophie sera décisive. Avec une quarantaine d’étudiants, ils fonderont la modeste Rose blanche pour appeler leurs compatriotes à se révolter contre le totalitarisme criminel auquel ils se trouvent asservis.
Leur arme ? Des tracts. Six au total seront diffusés. Cela suffira pour les condamner à mort après un simulacre de procès. »
Gilles Heuré, Telerama (4 octobre 2008) :
– Le jeune Hans, étudiant en médecine, parti sur le front russe comme infirmier, ne cesse de s’interroger non seulement sur le sens de la guerre, mais surtout sur la volonté et l’exigence qu’il lui faut déployer pour ne pas sombrer dans la folie collective. Convaincu que « l’homme a été créé intellectuel » et que lui-même, Européen, est un « épigone » et un « gardien de l’héritage européen », il refuse de voir la culture anéantie par un régime sanguinaire.
Curieux de la Russie, de la France et de ses écrivains, il lit Gide, Léon Bloy, Dostoïevski, Ernst Wiechert, s’indigne du sort des Juifs, victimes de l’extermination en masse.
Sophie Scholl, elle aussi, fait preuve d’une maturité intellectuelle étonnante. Dans saint Augustin, elle cherche un parcours spirituel, et se convainc qu’une jeune fille a non seulement le droit mais aussi le devoir de faire de la politique.
Les lettres où elle évoque ses baignades dans la mer du Nord ou ses promenades en forêt traduisent un irrépressible besoin de liberté. Et derrière ces lignes légères et émouvantes se cachent une volonté et un courage inouïs.
Membres du cercle étudiant de la Rose blanche, Hans et Sophie Scholl distribuèrent six tracts antinazis entre 1942 et 1943 – ce qui leur valut d’être condamnés.
Le nazisme leur apparaît non comme une doctrine, mais comme une « duperie collective« , un mensonge qu’il faut combattre de toutes ses forces. La foi en la culture et en la liberté de l’esprit inonde ces lignes magnifiques écrites par deux jeunes Allemands qui payèrent leur courage de leur vie.