Marie-Louise et Félix, les Justes de Plan-d’Aups distingués

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Dossier n°

12524

Marie-Louise et Félix, les Justes de Plan-d’Aups distingués

Du 15/01/2014

Sous l’occupation, le couple Redortier a caché des juifs dans son hôtel de La Grotte. Hier, soixante-dix ans après, sa mémoire a été honorée par une médaille, plus haute distinction civile de l’État d’Israël.

Marie Louise et Félix Redortier

Sur le mur des Justes de France il y a près de quatre mille noms. Parmi eux, ceux de Marie-Louise et Félix Redortier. Hier à Plan-d’Aups, leurs enfants Léopold et Simone ont reçu pour eux, à titre posthume, la médaille de Justes parmi les Nations décernée par l’institut Yad Vashem de Jérusalem.

«La plus haute distinction civile de l’état d’Israël », ainsi que l’a rappelé Barnea Hassid, le consul général d’Israël à Marseille lors de cette cérémonie sobre, solennelle. Et toute en émotion : les convives avaient en effet pris place dans la grande salle de La Pastorale, aujourd’hui centre de vacances pour enfant, mais qui, pendant la Seconde Guerre mondiale était connue comme l’hôtel de La Grotte. C’est là que les Redortier, ces hôteliers venus de Marseille, cachèrent successivement les époux Pewzner et leurs deux garçons, Alain et Roger, puis, en 1943, après que son époux Albert a été déporté, Bella Hanen et son fils Jacques. Au péril de leurs vies, ils vinrent aussi en aide à des réfractaires du Service du travail obligatoire ou encore à des réfugiés politiques espagnols.

Un couple ordinaire

Un couple d’hôteliers ordinaires, en somme, mais qui lorsque les circonstances se firent exceptionnelles, devinrent à leur tour extraordinaires. C’est ainsi que Jacques Hanen se souvient de ses sauveurs. Il avait alors 7 ans. Soixante-dix ans plus tard, l’émotion de retrouver cet endroit à l’époque dénué de tout confort est immense. La gorge serrée, il raconte : « Nous manquions de tout, mais je n’en avais pas l’impression : j’ai eu une enfance heureuse ! Nous allions dans les crêtes de la Sainte-Baume, poser des pièges pour attraper du gibier, allions à la cueillette des champignons…» Mais l’horreur n’est pas loin et Jacques sait bien que « ce couple[leur] a évité[à lui et à sa mère] d’aller grossir la montagne de sang des fours crématoires.» Marie-Louise Redortier a même été jusqu’à le faire baptiser, faisant de son fils, Léopold, alors âgé de 13 ans, son parrain. Pour ce dernier, tout comme pour sa sœur Simone, la médaille de Juste est une grande fierté.

« Chaîne humaine de la mémoire »

Il confie pourtant que « [ses]parents n’auraient sûrement pas compris cette distinction» : « Pour eux, il s’agissait simplement de leur devoir. Nous-mêmes n’étions pas vraiment au courant de ce qu’il se passait : nous savions qu’ils n’étaient pas dans la légalité, mais c’est tout.»

C’est finalement Sylvie Hanen, la fille de Jacques, qui a permis de raviver la mémoire et le courage des époux Redortier. « Au départ, c’est mon cheminement personnel dans mes recherches sur l’histoire de ma famille, marquée par le traumatisme de la Shoah, et dont mon père n’a jamais pu me parler,explique-t-elle. Une démarche pour me sentir reliée à mon grand-père, déporté avec 993 autres personnes dans le convoi 52 de Drancy vers le camp de Sobibór. »

Une démarche qui, en plus de permettre au petit Jacques de retrouver son parrain Léopold, vient consolider «la chaîne humaine de la mémoire » qu’affectionne tant Sylvie. Et qui à l’heure où le racisme, l’antisémitisme et la peur de l’autre semblent s’exprimer sans ambages rappelle que le visage de l’humanité est bien plus beau que la haine qui vient parfois déformer ses traits.