Suisse – « Paul Grüninger, le juste »

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Dossier n°

Suisse – « Paul Grüninger, le juste »


Le 18 août 1938, le gouvernement de la Confédération helvétique ordonna la fermeture des frontières pour les ressortissant(-e)s autrichien(-ne)s sans visa. Des centaines de personnes, essentiellement en provenance de Vienne, avaient fui le pays après « l’Anschluß » (l’intégration de l’Autriche dans le giron du IIIème Reich) du 12 mars précédent. Le 22 août, le Gauleiter Josef Bürckel institua un bureau central pour l’émigration juive. L’Obersturmbannführer SS Adolf Eichmann fut chargé d’organiser l’expulsion massive. En dix-huit mois, il se targua d’avoir chassé environ cent cinquante mille Juifs. La Suisse, prétendument « neutre », semblait a priori une terre d’accueil ou du moins un pays de transit.

Entorses à la réalité

Parmi les fonctionnaires heurtés par la directive bernoise, le commandant de la police saint-galloise Paul-Ernst Grüninger, pour qui « la légalité ne signifie plus rien lorsqu’il s’agit de survie ». Heinrich Rothmund (Robert Hunger-Bühler), le chef de la division Police et Justice, eut vent d’irrégularités du côté de Diepoldsau. Il dépêcha sur place l’inspecteur Robert Frei (Max Simonischek), inventé pour les besoins du récit, axé principalement sur les tensions entre les autorités intervenantes, afin qu’il évaluât la situation et rédigeât un rapport détaillé. Paul-Ernst Grüninger (Stefan Kurt) n’hésita pas à antidater des visas et à tronquer les statistiques des entrées sur le sol suisse. Après l’avoir couvert, le conseiller d’État social-démocrate Valentin Keel (Helmut Förnbacher) se détourna de lui. Le responsable de l’entraide israélite locale Sidney Dreifuss (Anatole Taubman) avoua avoir contrevenu aux instructions officielles sur les injonctions du haut gradé. Les supérieurs hiérarchiques de celui-ci le suspendirent, le 31 mars 1939, puis, le licencièrent, le 12 mai 1939, avec perte de salaire rétroactive au 4 avril, pour avoir falsifié des documents et enfreint les devoirs liés à sa fonction. Le réalisateur zurichois et le scénariste bade-wurtembergeois Bernd Lange ont enquillé les entorses à la réalité. Dépeignant comme des lâches les membres du Parti social-démocrate mêlés à l’affaire, ils ont complètement occulté le rôle, pour le moins sujet à caution, de Saly Mayer, le président de la Fédération suisse des communautés israélites entre 1936 et 1943. Ils citent un total de trente mille juifs refoulés entre janvier 1940 et mai 1945, alors que la Commission Bergier [1] l’avait réduit à vingt-quatre mille cinq cents et que Serge Klarsfeld, insoupçonnable d’un quelconque négationnisme, estime qu’il n’y en a eu que trois mille… [2] L’intérêt d’« Akte Grüninger – Die Geschichte eines Grenzgängers » repose davantage sur ce qu’il omet que sur ce qu’il nous expose à l’écran.

Réhabilitation longtemps avortée

Le 7 janvier 1939, Heinrich Rothmund, [3] alarmé par le chiffre croissant de réfugiés dans le canton de Saint-Gall, convoqua Valentin Keel dans la capitale. Vingt-et-un jours plus tard, Paul-Ernst Grüninger soumit au politicien des données « épurées ». Le 27 mars 1939, le Conseil cantonal enclencha une enquête administration à l’encontre du commandant de la police. Le juge Walter Härtsch mena l’instruction, qui aboutit à la mise à pied de ce dernier. Après une première audience, le 1er octobre 1940, le Tribunal du district, présidé par le juge Joseph Willwoll, condamna, le 23 décembre suivant, Paul-Ernst Grüninger à une amende de trois cents francs, à la prise en charge de 893,05 FS des frais de justice s’élevant à 1 243,05 FS, mais surtout confirma le bien-fondé de la radiation, tout en ne lui imputant aucune intention de retirer un bénéfice personnel de ses actes de désobéissance, qui sauvèrent la vie à environ deux mille femmes, hommes et enfants. L’ex-ailier gauche du FC Brühl [4] n’interjeta point appel. Il occupa quelques emplois précaires, par exemple la gérance d’un magasin de manteaux de pluie, comme agent de la Bâloise Assurances (accident et responsabilité civile), en qualité de représentant en matériels d’imprimerie, en vendeur de tapis ou de nourriture pour porcs… Dans les années 50, il reprit son métier d’origine et enseigna dans des classes d’école primaire, à titre d’intérimaire. Il décéda le 22 février 1972, à l’âge de 80 ans. Le 20 avril 1971, le Mémorial Yad Vashem à Jérusalem l’ajouta à la longue liste des « justes parmi les Nations », [5] car il facilita « l’entrée illégale de 3600 juifs », un chiffre nettement surévalué qu’avancent ses thuriféraires. Entre 1968 et 1989, cinq tentatives de réhabilitation achoppèrent sur le veto du gouvernement saint-gallois. La parution, en octobre 1993, de l’essai du journaliste à l’hebdomadaire Die Wochenzeitung (Zurich) Stefan Keller, au titre à double sens, « Grüningers Fall », [6] « Le cas Grüninger » ou « La chute de Grüninger », entraîna de notoires oscillations du curseur.

Spécificité idéologique

Le 30 novembre 1993, l’exécutif cantonal estima que Paul-Ernst Grüninger se serait conformé à des valeurs éthiques qu’ont désormais intégrées les législations suisse et internationales. Le 13 juin 1994, le Conseil fédéral réhabilita politiquement le déchu. Le 27 novembre 1995, le Tribunal du district décida de réexaminer la procédure pénale. Le 30, il annula le verdict du 23 décembre 1940. Le 5 mai 1998, le Grand Conseil saint-gallois approuva l’octroi d’un million trois cent mille francs pour la Fondation Paul Grüninger, qui sera enregistrée le 1er décembre 1998. Ne nous leurrons pas ! La majorité des dirigeants et de la population suisses a toujours considéré le respect de « l’ordre » et la soumission à l’autorité comme des vertus cardinales. Quiconque ose écharper ces notions s’expose immanquablement à l’estampille « Nestbeschmutzer » (« souilleur de nid »). Le journaliste et documentariste Roman Brodmann (18 juin 1920 – 1er février 1990), pour qui l’ironie grinçante, régulièrement jaillie de son stylo, a constitué une « arme » redoutable, de même que Jean Ziegler ont essuyé moult horions diffamatoires. La très tardive « reconnaissance » du normalien comme bienfaiteur renvoie à cette spécificité idéologique, au désir impérieux de corriger enfin l’image désastreuse reflétant le rôle, peu glorieux, du pays pendant la Seconde guerre mondiale, et non à des doutes résultant d’une étude sérieuse de « l’affaire ». Ses recherches tous azimuts ont conduit le journaliste israélien Shraga Élam, installé à Zurich depuis trois décennies et demi, à des interrogations que d’aucun(-e)s qualifieraient de « blasphématoires », tant elles érodent le « mythe » jusqu’à la moelle : « Paul Grüninger – Héros ou policier corrompu et agent nazi ? »… Une brochure en allemand de cinquante-cinq pages, [7] intégralement disponible sur le web, synthétise ses étonnantes trouvailles et les réflexions que celles-ci lui inspirèrent.

« Propagande »

Lorsque, le 23 janvier 1998, dans le cadre des 33èmes Journées cinématographiques de Soleure, j’eus visionné le documentaire de Richard Dindo, « Grüningers Fall », en partie basé sur l’ouvrage de Stefan Keller, je n’imaginais pas que seize années plus tard mes certitudes subiraient un tel ébranlement. À l’époque, j’en étais resté à la forte impression ressentie après la lecture de « La Suisse, l’or et les morts » de Jean Ziegler. [8] En le reprenant en mains, j’ai souligné, en confrontant ses thèses, singulièrement unilatérales, à d’autres sources, x erreurs [9] et omissions. [10] Pour Shraga Élam, l’occultation volontaire des motivations de Herrn Grüninger et du contexte contrevient à un des seuls principes qui vaillent : la vérité. « L’écriture de l’histoire s’imprègne inévitablement de connaissances partielles, mais aussi de préjugés, d’émotions et de composantes non factuelles ». Il range le film d’Alain Gsponer dans la catégorie « Propagande » et s’insurge contre les recensions complaisantes dans les médias. Or, ce « symbole de l’honnête homme », que son courage civique et son amour du prochain rendraient admirable, aurait surtout servi les desseins des nationaux-socialistes au pouvoir outre-Rhin, contrariés par le bouclage des frontières. À la fin des années trente, les nazis envisageaient de se débarrasser des juifs en les contraignant à l’exil. [11] Alors que Berne et des cadres de la Fédération des communautés israélites s’opposèrent à l’entrée de migrants supplémentaires, Paul-Ernst Grüninger favorisa leur venue. Sidney Dreifuss, [12] dépeint comme généreux et noble, ne vit pas ce flux d’un bon œil. Il ne dissimula guère une certaine aversion à l’encontre des ashkénazes (provenant de l’est européen). Le 18 décembre 1938, lors d’une réunion du Comité directeur du S.I.G., [13] il tempêta contre la maréchaussée trop laxiste et l’intrusion « d’éléments indésirables ».

Efforts de sauvetage sabotés

Le 25 août 1933, le directoire de la Jewish Agency avait signé avec le ministère des Finances « l’accord Haavara » (« passage », « transfert ») selon lequel les juifs allemands qui désiraient s’implanter en Palestine pouvaient y emporter une partie de leurs biens, et un minimum de mille livres sterling. La Grande-Bretagne, qui exerçait alors son « mandat » sur le territoire, avait fixé cette exigence pour la domiciliation en tant que « capitaliste », appellation conférée à ces immigrants. Si ceux-ci ne récupérèrent qu’une portion congrue de leur patrimoine, du moins s’enracinèrent-ils sur ces « terres promises ». La conférence d’Évian (du 6 au 15 juillet 1938), initiée par le président US Franklin Delano Roosevelt pour tenter d’améliorer les conditions de départ des juifs allemands et autrichiens, se solda par un échec. L’avocat américain George Rublee et le boss de la Reichsbank Hjilmar Schacht échafaudèrent, entre le 14 et le 17 décembre 1938 à Londres, un plan quinquennal en vue de l’émigration des israélites de nationalité germanique aptes à travailler et des « apatrides ». Après le congédiement du second, George Rublee poursuivit les discussions avec Helmuth Wohlthat, secrétaire d’État au Commerce International. Le Comité intergouvernemental pour les réfugiés examina, les 12 et 13 février 1939, son mémorandum. Le projet n’aboutit à aucune mesure concrète, en raison non seulement des réticences américaines et britanniques, mais surtout de celles de la Jewish Agency. À en croire le chercheur israélien Shabtai Beit-Zvi, celle-ci sabota systématiquement les efforts de sauvetage. Il pense qu’il eût été possible de dénicher un point de chute pour l’ensemble des juifs… Les sionistes, planqués loin des contrées où se déchaînera bientôt la brutalité exterminatrice du IIIème Reich, se cabrèrent avec véhémence contre les alternatives à la « colonisation » au Proche-Orient, une menace risquant de compromettre l’édification de l’État hébreu, au mépris le plus cynique du sort de leurs frères et sœurs…

Inclinations ultra-droitières

 

C’est à l’aune des réalités, si incommodes pour les partisan(-e)s de simplifications manichéennes, qu’il convient d’analyser l’attitude de Paul-Ernst Grüninger. Stefan Keller a avoué avoir été payé pour monter le dossier en épingle. Il a sciemment négligé les textes incriminants, taxant les indices négatifs de « non fiables », de « rumeurs colportées par la police fouille-merde ». Il concéda l’existence de zones d’ombre, mais pour les minimiser. Comme chacun(-e) d’entre nous, son « héros » a une personnalité contrastée, voire complexe, et se dépatouille avec ses contradictions ! Fermez le ban ! Son travail méticuleux, y compris pour éliminer les vilaines scories susceptibles d’écorner la stature et la statue de « l’humaniste », lui a valu, en 1997, le titre de Docteur en Histoire décerné par l’université de Bâle. Prosit ! Pour son procès, le blackboulé choisit comme avocat Willi Hartmann, un militant du Schweizerischer Vaterländischer Verband, la Fédération patriotique suisse, d’extrême-droite, anticommuniste et judéophobe. Hermann Landau, qui cornaquait le bureau d’entraide de Montreux, prétendit que Saly Mayer avait dénoncé monsieur Grüninger. [14] Rien n’indique que celui-ci, délesté, contre son gré, de ses obligations professionnelles, eût manifesté une quelconque solidarité envers les infortuné(-e)s. Il frayait avec des nazis, qu’il traitait comme des « amis », le capitaine Karl Süss, chef de la douane de Lindau et employé du service d’espionnage allemands pour la Suisse, Joseph Schreieder, à la tête du commissariat gestapiste de Lindau, et Mario Karrer, leader local de la Nationale Front. Il collabora aussi avec les Allemands contre les combattants de la révolution espagnole fuyant le régime franquiste. Il aurait émargé sur le listing des adhérents du Mouvement national de la Suisse, interdit le 19 novembre 1940. Werner Stocker, le secrétaire du Parti social-démocrate, très engagé dans l’entraide aux réfugiés, l’accusa de se laisser soudoyer pour sa bienveillance…

Un « juste », cet homme adulé, qui, quarante-deux ans après son trépas, passe pour ce qu’il n’était pas ? D’authentiques courageux, nullement mus par de minables calculs combinards, tels que le vice-consul à Bregenz Ernest Prodolliet (Patrick Rapold dans le film d’Alain Gsponer), la juive orthodoxe Recha Sternbuch-Rottenberg et le susmentionné Werner Stocker, qui sauvèrent des centaines de personnes, n’eurent jamais droit à de semblables honneurs, ni de leur vivant, ni à titre posthume…

René HAMM

 

[1] Portée sur les fonds baptismaux, le 19 décembre 1996, par le Conseil fédéral et conduite par l’historien lausannois Jean-François Bergier (décédé le 29 octobre 2009), elle publia vingt-cinq monographies sur les rapports qu’avait entretenus la Confédération avec les protagonistes de la seconde guerre mondiale, en particulier l’Allemagne nazie, ainsi que sur « l’étendue de l’affaire des fonds en déshérence », en clair, la spoliation des citoyen(-ne)s de confession israélite.

[2] Dans Der Sonntag du 10 février 2013

[3] À l’occasion de la conférence annuelle réunissant les chefs des polices cantonales des étrangers, les 25 et 26 septembre 1942, dans les salons feutrés du Palace Hôtel à Montreux, il insista « sur les dangers d’une israélisation du pays », que jusqu’ici le peuple a su contenir. Pour lui, les juifs sont des « étrangers ». Il se prononça en faveur d’un « règlement militaire » de cette « situation critique »…

[4] Depuis le 20 mai 2006, le stade de ce club porte son nom. Le 6 mai 2012, fut inaugurée, sur le pont enjambant un bras mort du Rhin, reliant Diepoldsau et Hohenems, une plaque en son honneur. L’idée germa chez les Verts saint-gallois et leurs homologues du Vorarlberg

[5] Littéralement « généreux des nations du monde », expression tirée du Talmud, le fondement de la « Halakha », la loi juive. Au 1er janvier 2014, il y eut 25 271 justes émanant de 49 pays

[6] Rotpunktverlag à Zurich, 264 pages. La cinquième édition, en janvier 2014, coûte 16 euros. La version française : « Délit d’humanité » aux Éditions d’En Bas à Lausanne, janvier 1994, 18 euros. Entre octobre 1992 et janvier 1993, il publia dans la Wochenzeitung une série en onze épisodes dont la mouture étoffée donna lieu au livre

[7] Décembre 2003 chez Pro Libertate à Berne

[8] Au Seuil, mars 1997, 324 pages, 120 F. Le format poche dans la collection « Points », sorti en octobre 2008, coûte 9,50 euros

[9] Par exemple la condamnation du capitaine « à l’automne 1940 », alors qu’elle fut prononcée le 23 décembre 1940, un descriptif tronqué, enjolivé, des missions effectuées par la Fédération suisse des communautés israélites ou « des dizaines de milliers de juifs persécutés qui ont demandé en vain le droit d’asile… »…

[10] Dont un aspect aussi scabreux que non anodin : la coupable coresponsabilité du Congrès juif mondial et des organisations confessionnelles dans le massacre à l’échelle « industrielle » de six millions de coreligionnaires. Le 20 janvier 1942, dans la villa Marlier à Wannsee, un quartier huppé au sud-ouest de Berlin, Reinhard Heydrich, Adolf Eichmann, Roland Freisler et douze autres dignitaires proches du Führer, arrêtèrent les « modalités techniques, administratives et économiques » de la « solution finale » visant onze millions de juifs. Dans le documentaire « Nachrichten aus dem Untergrund » d’Andreas Hoessli, à l’affiche, les 22 et 23 janvier 1998, des 33èmes Journées soleuroises, Gerhart Riegner (12 septembre 1911 – 3 décembre 2001), à la tête du bureau genevois du C.J.M., conclut son poignant témoignage par ces mots terribles : « On ne m’a pas cru ! ». Il collecta des informations quant aux massacres de masse en préparation. Le 8 août 1942, il expédia au rabbin Stephen Wise à New-York et au parlementaire britannique Samuel Sydney Silverman un télégramme des plus alarmants. Il le câbla aussi à la légation britannique à Berne, au consulat américain à Genève et au Comité international de la Croix-Rouge, lequel confirma la validité du renseignement. Aucun des destinataires n’y discerna matière à mobilisation…

[11] Le « Manuel d’histoire critique » publié en septembre 2014 (179 pages, 11,95 euros) par Le Monde diplomatique, évoque très subrepticement, page 79, une « expulsion » vers Madagascar, un « regroupement » en Pologne, une « réserve » en Sibérie. Une déportation au Kénya ou en Ouganda fut également envisagée. Évidemment, les intrigues et blocages fatals des instances israélites sont complètement passés sous silence. Pourtant, dans son éditorial, Serge Halimi annonce : « Aucun dogme, aucun interdit, pas de tabous »

[12] Le père de Ruth Dreifuss, conseillère fédérale (Département de l’Intérieur) entre le 1er avril 1993 et le 31 décembre 2002. Le 9 décembre 1999, elle devint la première femme à occuper le poste de présidente de la Confédération, qui revient, pour douze mois, à un des sept membres du collège gouvernemental

[13] Schweizerischer Israelitischer Gemeindebund

[14] Dans un courrier au magazine du Tages-Anzeiger en date du 1er décembre 1984