Article de la Nouvelle république
Dans un contexte de montée des actes antisémites en France, un jardin des Justes a été inauguré vendredi 26 janvier 2024, à Chinon.
Un jardin des Justes a été inauguré vendredi à Chinon, au niveau du Vieux Marché, en face de la maison familiale de Jacques Caen, dont une partie de la famille a été déportée et assassinée au camp d’Auschwitz-Birkenau.
« J’espère que tous les élèves retiendront qu’un homme très âgé leur a dit : soyez Juste, soyez citoyen. Jamais plus la barbarie. Je sais que les Justes ont été importants, qu’ils sont importants et qu’ils seront importants. » Les mots de Jacques Caen résonnent comme un avertissement sur les bégaiements des atrocités de l’histoire.
Du haut de ses 97 ans, celui qui a vu une partie de sa famille être arrêtée, déportée et assassinée au camp d’Auschwitz Birkenau, a participé à l’inauguration du jardin des Justes vendredi 26 janvier.
Au moment de choisir un emplacement pour cette esplanade, l’endroit était tout trouvé pour la Ville de Chinon : à côté du rond-point du Vieux Marché, en face de la maison où ont vécu les familles Caen et Cahen, au 83, rue Haute-Saint-Maurice (ce lieu accueillait par le passé le monument aux morts).
Sur la plaque figure le nom de Régine et Paul Girard, un couple de Chinonais qui a caché trois enfants juifs de 1943 à 1945, reconnus à titre posthume Justes parmi les Nations en 2016. Robert Voisin, docteur à Ligueil, qui a permis à Jacques Caen de passer la ligne de démarcation en juillet 1942, a obtenu la même reconnaissance, via le Comité français pour Yad Vashem, le 20 décembre 2023.
Hausse exponentielle des actes antisémites
Alors que les actes antisémites ont bondi en France depuis l’attaque terroriste du Hamas en Israël le 7 octobre 2023 (563 en octobre, 504 en novembre et 175 en décembre, soit + 1.000 %), cette inauguration est d’actualité. « C’est au moment où l’histoire tangue qu’il faut réaffirmer ces valeurs », selon Jean-Luc Dupont.
Pour François Guggenheim, vice-président du Comité français pour Yad Vashem, « l’enseignement de la mémoire est une nécessité pour essayer d’éviter que les fautes du passé ne se renouvellent, mais malheureusement l’histoire nous prouve que l’homme oublie très vite. S’attaquer à des juifs parce qu’ils sont juifs, c’est s’attaquer à notre démocratie, ce danger nous menace tous. Face à la recrudescence exponentielle des actes antisémites, je me demande si demain, nous n’aurons pas à nouveau besoin de Justes parmi les Nations. »
La jeunesse impliquée dans le devoir de mémoire
De nombreux écoliers et collégiens ont assisté à cette cérémonie, ont lu des poèmes, chanté (dont l’émouvant Chant des marais). Les élèves de 3e du collège Jean Zay mènent cette année un projet citoyen autour de la mémoire. Ils ont reçu la visite de Jacques Caen dans l’après-midi. « L’histoire locale donne du sens à nos cours », explique Paul Poulain, professeur d’histoire géographie. Evans, Gabin et Raphaël, collégiens, confirment. « Avoir un témoignage direct, c’est plus parlant. On le voit (l’antisémitisme) est actuel, malheureusement on ne pourra pas le faire disparaître, mais en parler, se rappeler, ne pas oublier, c’est important. » Le message de Jacques Caen a bien été reçu par les jeunes.