Histoire du sauvetage de la petite Florette Brand par les Batisse

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Dossier n°

Histoire du sauvetage de la petite Florette Brand par les Batisse

Ce 12 février, six nouveaux Justes parmi les Nations sont honorés à la Mairie du 11e Arrondissement de Paris.
Au nombre d’entre eux : Alphonsine et Pierre Batisse.

Mairie du 11e, Place L. Blum (Photo : V. Saül, DR).

 

 

Après la synthèse des motifs exceptionnels pour lesquels Pierre Nicolini vient d’être reconnu Juste (lire P. 107), voici les raisons liées à l’histoire de la Shoah en France et pour lesquelles le couple formé par Alphonsine et Pierre Batisse reçoit lui aussi, mais à titre posthume, Médailles et Diplômes.

 

– « Nous sommes en 1924. Jacob Brand, né en 1903 à Varsovie quitte la Pologne pour Paris. Il trouve un petit logement Impasse Volga, dans le 20 ème et un emploi de garçon de restaurant rue des Rosiers.
En 1925, il fait venir sa mère, son épouse Chava, née à Varsovie en 1902 et leur fils Michel, né le 29 mai 1925 à Varsovie.
La famille va s’enrichir de trois autres enfants :
– Léon, né en 1927, 
– – Henri en 1932, 
et Florette en 1937.
Durant une période faste, Jacob Brand a repris le restaurant de son patron, au 6, rue des Rosiers. Malheureusement, en 1935 la situation se dégrade et Jacob se convertit en marchand forain.
La famille Brand est contrainte de déménager au 1, rue Félix Terrier, puis dans un HLM de trois pièces, rue Eugène Ruiz, toujours dans le 20 ème.
Juste en face, vivent Alphonsine et Pierre Batisse avec leurs cinq filles.
Les deux familles s’apprécient énormément, si bien que parents et enfants se lient d’amitié.

 

Survient la guerre, la capitulation de la France et l’occupation allemande avec son cortège de lois anti-juives.
Un évènement dramatique survenu dans la famille, l’exécution de leur beau-frère Moishé Burstyn, communiste, en décembre 1941, incite Jacob à gagner la zone libre avec ses fils, qui ont dû quitter l’école.
Il est prévu que son épouse Chava et la petite Florette, 5 ans, les rejoindront au plus vite. Elles partent donc en juin 1942 pour franchir la ligne de démarcation en Saône et Loire avec l’aide d’un passeur. Mais celui-ci les dénonce, et toutes les personnes qui lui avaient fait confiance sont arrêtées et transférées au pavillon psychiatrique de l’Hôpital d’Autun. Ce lieu avait été transformé en prison pour femmes et enfants juifs.
Les prisonnières sont enfermées et maltraitées par les Allemands. La petite Florette, tombée gravement malade est hospitalisée à l’hôpital d’Autun tenu par des sœurs à cornette. Chava n’a qu’un but, sauver sa petite fille. Elle y parvient grâce à l’aide d’une des sœurs. Celle-ci se charge d’écrire à Jacob à Limoges, qui contactera les Batisse afin de leur confier l’enfant. Puis, faisant preuve d’un dévouement exemplaire, elle l’accompagne elle-même à Paris où les Batisse attendent leur petite protégée sur le quai de la gare.

 

 

Pierre Batisse (DR).

 

Ironie du sort, les Batisse demeurent désormais dans un pavillon à Drancy, tout près du camp où Chava est internée. Elle souhaiterait apercevoir ses amis et son enfant, mais son vœu ne se réalise pas et elle est déportée sans retour par le convoi 35.
Durant plus de trois ans, Florette sera protégée et choyée par la famille Batisse, traitée comme leur sixième fille par ces personnes au grand cœur qui mettaient en péril toute leur famille.
Elle est scolarisée sous son vrai nom avec la complicité de la directrice, Madame Walembois, dont le mari est résistant. De plus, tout le voisinage connaissait la situation mais la solidarité était le maître mot de l’époque et sa sécurité fut assurée.

A cette époque, Jacob Brand et ses fils avaient quitté Limoges pour Grenoble qui paraissait plus sûr. L’aîné des garçons Michel Brand, a rejoint la Résistance dans les rangs des FTP (Francs-tireurs et Partisans).
Malgré les restrictions, Jacob parvenait à trouver un peu de ravitaillement dans la région et expédiait des colis alimentaires qui étaient les bienvenus à Drancy. En 1943, Madame Batisse prenant d’énormes risques, accompagne Florette dans l’Isère pour qu’elle rencontre son père et ses frères. La présence des Allemands dans le train rend ce voyage périlleux, mais tout se passe bien, grâce au sang-froid de notre héroïne.

Alphonsine Batisse (DR).

 

La guerre finie, Jacob Brand retrouve sa fille en 1945, Florette est déchirée de quitter ses bienfaiteurs et elle gardera une affection intacte pour ceux qui l’ont traitée avec tant de bonté et l’ont protégée jusqu’à la Libération.
Monsieur Brand témoignera sa reconnaissance à ces personnes exemplaires en aidant Monsieur Batisse dans son parcours professionnel et son métier de comptable.
L’amitié ne se démentira jamais entre les deux familles. »

En présence du Maire du 11e Arrondissement, Patrick Bloche
et du Responsable du Département des Justes du Comité Français pour Yad Vashem, Louis Grobart,

cette cérémonie se déroulera dans la Salle des Fêtes de la Mairie le 12 février 2009.