Bertrand Fabre
Marie Fabre
Les Bachmann quittent Kichinev en Bessarabie au début du 20ème siècle, fuyant les pogroms. Salomon Bachmann, né en 1857, devint cultivateur en Argentine avec son épouse Zina et leurs huit enfants. Ruiné après deux années de récoltes de céréales ravagées par les sauterelles, Salomon se résigna en 1910 à rejoindre Bernard, son fils aîné, qui avait émigré de Kichinev à Paris.
Henri (Chaïm), avait alors 16 ans et trouva un emploi dans un magasin de chaussures. Devenu fourreur, il rencontra Amélie Tykoczinski, née à Nancy dans une famille d’origine russe. Amélie travaillait en famille dans le tissu et vendait sur les marchés de la région de Châlons-sur-Marne. Ils se marièrent en 1923 à la mairie du 13ème arrondissement de Paris et s’installèrent à Châlons-sur-Marne avec leur quatre enfants : Jean et Pierre, les jumeaux, Jacques, né en 1929, et la petite Nicole. Ils ouvrirent un commerce de vêtements en centre ville.
Après la déclaration de guerre, Henri Bachmann décida de mettre les siens à l’abri en Bretagne, tandis qu’il resta seul à Châlons. Le 16 mai 1940, la famille réunie prit la route de l’exode jusqu’à Andernos-les-Bains (Gironde). Ils rentrèrent à Châlons 4 mois plus tard pour retrouver la boutique saccagée.
Les Bachmann se déclarèrent en tant que « juif » au commissariat de police et leurs cartes d’identité furent marquées du tampon rouge. Déchu de sa nationalité par Vichy, Henri vécut sous la menace permanente d’une arrestation. Sans attendre que son magasin lui soit confisqué, il le céda à son fidèle comptable, Monsieur Moreau. Dénoncé pour vente illicite, Henri fut condamné à 5 mois de prison. Il fut libéré le 5 mars 1942 grâce à son ami Monsieur Barat, directeur de la prison.
Quelques jours plus tard, les Bachmann réussirent à prendre place dans le train d’Angoulême, sans éveiller l’attention. De là, ils prirent un train jusqu’à Chasseneuil, un village en Charente proche de la ligne de démarcation. De là, un passeur leur permet de rejoindre la zone sud. Arrivés à Villeneuve-sur-Lot, la famille s’installe à l’hôtel Gache avant de louer un modeste appartement rue Alphonse de Poitiers (aujourd’hui rue de la Convention). Les enfants fréquentèrent les établissements scolaires de la ville et Jacques participa aux équipes d’aviron et de rugby de la ville.
Henri trouva des petits boulots et fit ainsi la connaissance de Bertrand Fabre, qui habitait à Villeneuve avec son épouse Marie et leur fille Nanou, née en 1923. Membre de la résistance locale, mécanicien automobile et réparateur de machines à coudre, Bertrand Fabre réparait également les armes des maquis. Son domicile était la boîte aux lettres du réseau Marguerite Drouilhet qui mourra en déportation et abritait un jeune alsacien déserteur de l’armée allemande. Prévenu des rafles dans la bastide, Bertrand Fabre accueillait les Bachmann quand le danger menaçait.
A partir de juillet 1943, la famille se sépara pour se réfugier dans des fermes, grâce à l’aide du réseau de Bertrand Fabre. Jean et Pierre, quant à eux, avaient rejoint le maquis. Ils participeront à la libération du Lot-et-Garonne et défileront avec le bataillon Palissy le 22 août 1944 à Agen. Le 18 novembre 1944, Bertrand Fabre mourut brutalement.
Le 8 mai 1945, jour de l’annonce de la capitulation de l’Allemagne, tous prirent part à la fête. Les Bachmann apprendront après leur retour la disparition de 7 membres de leur famille. Cinq avaient été arrêtés et déportés sans retour : Maurice Kremer, Georges Koupermann, Elise Bronstein, Fernand Bronstein, 20 ans, et Renée Bachmann. Marcel Bachmann avait été fusillé à Lyon. Raymond Bachmann était mort enseveli par une avalanche dans les Pyrénées.
La paix revenue, la famille Bachmann rentra à Châlons. Monsieur Moreau avait veillé à la bonne marche de l’atelier de fourrure et leur restitua le magasin. Jacques repris ses études au collège de Châlons. Marie et Nanou, très affectées par la disparition de Bertrand, quittèrent Villeneuve et partirent s’installer chez le frère de Marie à Clermont-Ferrand. C’est là que Nanou se maria en 1946. Elle suivit son mari en Afrique, puis le couple s’installa à Marseille où il ouvrit un commerce.
Jacques deviendra journaliste-photographe pour des revues spécialisées en architecture et décoration. En 2012, il retrouvera Nanou Fabre, revenue à Villeneuve 7 ans auparavant.
Le 21 août 2013, l’Institut Yad Vashem Jérusalem a décerné le titre de Justes parmi les Nations à Monsieur Bertrand Fabre et à son épouse Madame Marie Fabre.
Documents annexes
Invitation cérémonie Fabre 25 juin 2014 15:16:54 | |
Article de presse – Magazine Ancrage 17 décembre 2013 08:40:21 |