La mère des enfants de l’holocauste
Anna Mieszkowska, historienne du théâtre et documentaliste aux archives de l’Académie polonaise des sciences, née à la fin des années 50, a découvert, grâce à un spectacle de lycéennes américaines présenté en 2001 à Varsovie, le rôle héroïque joué pendant la seconde guerre mondiale par sa compatriote Irena Slenderowa.
Celle-ci, surnommée depuis « la mère des enfants de l’Holocauste« , a sauvé du ghetto de Varsovie, et donc de la mort et de la déportation 2 500 enfants juifs entre octobre 1940 et avril 1943, ce qui est révélateur des « trous de mémoire » dans l’histoire contemporaine de la Pologne.
Car si dès 1965, elle est devenue une des premières « Justes parmi les Nations », les personnes de confession non juive, qui ont mis leur vie en danger pour sauver des Juifs, honorées par le mémorial Yad Vashem de Jérusalem, en Pologne, il a fallu attendre le 3ème millénaire pour qu’elle soit officiellement reconnue en recevant l’Ordre de l’Aigle blanc, la plus haute distinction civile polonaise.
Alors que la vielle dame, qui avait déjà relaté son histoire dans des écrits et des articles, ne voulait plus revenir sur le passé (« Raconter mes épreuves m’épuise. Les souvenirs et les cauchemars hantent mes nuits »), même s’il était toujours présent et alimenté par les visites des enfants sauvés, Anna Mieszkowska est allée la voir et l’a convaincue d’en parler encore pour le livre qu’elle voulait lui consacrer.
Ce livre présenté comme une biographie ne correspond pas à cet exercice particulièrement difficile en ce qu’il implique un travail d’historien d’analyse et de synthèse, mais davantage à une prosopographie en ce qu’il est essentiellement composé de courts chapitres thématiques constitués d’une compilation d’extraits de textes et ouvrages disponibles sur Irena Slenderowa et sur le ghetto de Varsovie dans laquelle sont insérés les propos tenus par cette dernière lors d’entretiens avec l’auteur.
Par ailleurs, les chapitres consacrés à la vie de Irena Slenderowa sont relativement succincts et essentiellement factuels de même que les chapitres consacrés au sauvetage des enfants.
D’ailleurs, à cet égard, l’avant-propos rédigé par Boguslawa Filipowicz, professeur en sciences sociales appliquées et resocialisation à l’Université Cardinal Stefan Wyszyński de Varsovie, qui a assuré la traduction de l’ouvrage, en délimite clairement la structure et la portée indiquant que son auteur « endosse le rôle d’une personne organisant la documentation écrite et les sources orales ».
En conséquence, la lecture s’en avère décevante tant sur la situation du ghetto de Varsovie, notamment au regard d’un ouvrage comme celui de l’historien américain Samuel D. Kassow sur les archives secrètes du ghetto de Varsovie constituées par Emanuel Ringelblum, que sur Irena Slenderowa et sur la structure officieuse baptisée Zegota, la Commission d’Aide aux Juifs créée par la résistance polonaise et financé par le gouvernement polonais en exil à Londres, au sein de laquelle elle travaillait en parallèle avec sa fonction officielle d’assistance sociale, et qui était chargé d’exfiltrer les juifs du ghetto.
Décédée en 2008 à l’âge de 98 ans, Irena Sendlerowa avait un beau visage de babouchka. Le lecteur devra cependant aller sur le net pour découvrir son visage car l’ouvrage qui lui est consacré ne comporte aucune photo, pas même un simple portrait en médaillon, la laissant ainsi, encore, dans l’anonymat et il en apprendra tout autant sur sa vie.
L’intérêt de l’ouvrage réside dans le listage hagiographique des Polonais restés à l’ombre de la médiatisation, souvent engagés politiquement et investis dans la résistance, qui pendant cette période noire de l’histoire de la Pologne ont réellement au péril de leur vie, toute intervention au profit de personnes juives étant punie de la peine de mort, aidé et sauvé des Juifs.
Quant à la biographie de Irena Slenderowa, elle reste à écrire
source:http://www.froggydelight.com/article-11883.html du 06/05/2012