En hommage à Gina Libera, Juste parmi les Nations

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Dossier n°

En hommage à Gina Libera, Juste parmi les Nations

A 96 ans, Gina Libera vient de s’éteindre. Cette Juste avait sauvé de la Shoah la famille Stoutzer…

Les deux premières pages de ce blog décrivent la cérémonie de reconnaissance de Justes parmi les Nations qui se déroula le 3 décembre 2007 à l’Assemblée nationale. Des onze Justes honorés à cette occasion, une seule ne le fut pas à titre posthume : Gina Libera. La nombreuse assistance avait été unaniment impressionnée et par sa personnalité à la fois douce et volontaire, et par son courage tranquille. Aussi furent-elles nombreuses et respectueuses les marques d’attention qui saluèrent sa présence dans les salons de l’Hôtel de Lassay.

 

3 décembre 2007 : l’émotion de Gina Libera avant de recevoir sa médaille et son diplôme des mains de l’Ambassadeur d’Israël à Paris, Daniel Shek (Photo : JEA). Plus tard, elle devait être décorée de la Légion d’Honneur (Voir photo en bas de page).

Hélas, cette Juste parmi les Nations vient de s’éteindre. Elle était âgée de 96 ans.

Nous présentons à sa famille et à ses proches, ainsi qu’aux familles Le Guiniec et Stoutzer, nos condoléances les plus émues et les plus sincères.

Voici l’hommage qui lui fut rendu lors de la cérémonie organisée par le Comité Français pour Yad Vashem :

 

– « Le couple Stoutzer s’était installé à Paris en 1926. Lui, Hirsch Stoutzer, était originaire de Vilna en Lituanie. Elle, Rosa, née Tanevitzky, était venue d’Odessa en Russie. Leur premier fils, Armand, naquit en 1927. Le second, Roger, en 1932. Ils habitaient 24 rue du Faubourg Poissonnière, dans le 10ème arrondissement. Ils avaient un magasin de fourrures au 46 de la même rue. Pendant l’occupation, tous durent porter l’étoile jaune, les biens de la famille furent spolliés et le magasin passa aux mains d’un gérant « aryen ».

Gina Libera était marchande de journaux. Elle était née en 1912 à Forcola, en Italie et elle avait naturalisée française en 1935. Elle tenait un kiosque rue Richer dans le 9ème arrondissement mais habitait au 8 de la rue du Faubourg Poissonnière. Elle s’était liée d’amitié avec ses proches voisins, les Stoutzer.

Lorsque les rafles commencèrent, les Stoutzer en furent prévenus par des policiers compatissants. Les parents et les enfants Stoutzer trouvèrent chaque fois refuge chez Gina Libera. Celle-ci leur ouvrit grandes ses portes et ne se préoccupa en rien des risques qu’elle prenait. Cela se produisit à plusieurs reprises, au moins cinq ou six fois se souvient Roger Stoutzer, et Gina Libera les cacha plusieurs semaines. Cet hébergement clandestin leur permit donc d’échapper aux rafles et d’avoir la vie sauve. De plus, leur amie reçut des marchandises et cacha des bijoux appartenant à un bijoutier de la famille des Stoutzer. Le tout fut intégralement restitué après la libération.

Pendant toute l’occupation de 1940 à 1945, Gina Libera mit régulièrement à l’abri le jeune Roger Stoutzer. Pour ce faire, ce dernier effectua de longs estivaux à Saint-Nicolas-des-Eaux dans le Morbihan, chez Marie et Charles Henri Guy (ses ex-belle soeur et beau-frère). Gina l’y envoyait avec son propre fils, Jean Le Guiniec. Les deux garçons qui avaient une dizaine d’années, partaient un peu avant les « grandes vacances » pour ne revenir qu’une ou deux semaines après la rentrée scolaire.

Pour Gina Libera, sa conduite était « normale » puisque Rosette Stoutzer était sa « copine » !

 

Roger Stoutzer avec ses cheveux blancs mais comme redevenu un enfant, main dans la main avec celle qui l’a sauvé, Gina Libera. Cérémonie du 3 décembre dernier (Photo : JEA).

 

Pour rappel, Marie et Charles Henri Guy furent également reconnus (mais à titre posthume) comme Justes parmi les Nations au cours de cette même cérémonie. Jean Le Guiniec reçut en leurs noms les médailles et diplômes de Yad Vashem.

 

 

Après la cérémonie organisée par le Comité Français pour Yad Vashem, Gina Libera fut élevée au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur en sa qualité de Juste parmi les Nations .

« LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE, GRAND MAITRE DE L’ORDRE NATIONAL DE LA LEGION D’HONNEUR, nomme, par décret de ce jour, Madame Gina LIBERA, Ancienne employée, Juste de France… CHEVALIER DE LA LEGION D’HONNEUR. »