Jeanne Guilhem, Juste parmi les Nations

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Dossier n°

Jeanne Guilhem, Juste parmi les Nations

Le nouvelliste

 

Bernard Guilhem reçoit la médaille des Justes parmi les Nations, entouré d’Alain et Serge Frank, de Michel Lugassy-Harel et Michel Alitenssi.
Le 1er avril 1944, Jeanne Guilhem a sauvé la vie de deux frères juifs, Alain et Serge Frank, 5 et 7 ans, en les soustrayant à la rafle SS qui avait lieu sur la place du village de Tourtoirac en Dordogne.

68 ans plus tard, à Bussière-Galant, 150 personnes étaient réunies pour lui rendre hommage, pour la remise, à titre posthume, de la médaille des « Justes parmi les Nations ». Jeanne Guilhem était représentée par son petit-fils Bernard Guilhem, par Michel Lugassy-Harel, ministre auprès de l’ambassade d’Israël en France, ce dimanche 1er avril. Parmi les personnes présentes, Michel Alitenssi, délégué du Comité français pour Yad Vashem, la municipalité de Bussière-Galant et de Saint-Nicolas-Courbefy, commune associée, des représentants de la communauté d’Israël de Limoges, des élus de la communauté de communes, Sylvie Achard conseillère régionale représentant le président Jean-Paul Denanot, des représentants de la gendarmerie et surtout d’Alain et Serge Frank, accompagnés de leur famille, à l’origine de cette cérémonie, placée sous les couleurs d’Israël, le bleu et le blanc, par la volonté d’Evelyne Guilhem, épouse de Bernard Guilhem.
Jeanne Guilhem, appelée Louise dans la vie courante, était une femme au caractère affirmé. Pendant la guerre, veuve, elle élevait son fils unique Georges et tenait un hôtel-restaurant sur la place. Un jour, voyant les enfants à la porte de son établissement, elle les a attrapés par la main, les a d’abord cachés sous le comptoir puis les a enfermés dans une chambre, leur sauvant ainsi la vie et par là même risquant la sienne. Les enfants avaient vu leurs parents et leur petit frère Gilbert, 14 mois, arrêtés par les Allemands et s’apprêtaient à aller les retrouver. Ces personnes arrêtées firent partie du convoi 71 au départ de Drancy et furent exterminées à Auschwitz, le 13 avril 1944. Après être restés un moment dans la commune, les deux frères furent emmenés dans une institution où ils restèrent jusqu’à la fin de la guerre.
Durant leur vie de travail, ils n’évoquèrent pas cette période de leur passé. Arrivé à la retraite, Serge Frank, aidée par son épouse Claudine, a éprouvé le besoin de retricoter les fils du passé. Il a entrepris des recherches pour retrouver les personnes qui les avaient aidés, lui et son frère, pendant la guerre. Il est remonté jusqu’à Bernard Guilhem, petit-fils de Jeanne, son fils Georges étant décédé. Il a souhaité que la médaille des Justes parmi les Nations soit décernée à la famille et a fait les démarches nécessaires auprès de l’Institut Yad Vashem de Jérusalem, créé en 1953. Cela a pris plusieurs années. Cette médaille est remise à des personnes non juives qui ont sauvé, au péril de leur vie, des personnes juives durant l’occupation. Serge Frank intervient aussi dans des établissements scolaires pour témoigner de cette période.
« C’est la première fois qu’une telle médaille est décernée sur notre commune. Il est nécessaire et urgent de se souvenir encore et toujours », a dit Martine Beylot, maire de la commune. Pour Michel Alitenssi : « C’est le courage de tous ces justes qu’il faut honorer. » « Beaucoup de justes ont agi par devoir d’humanité, de citoyen. Ils sont la fierté de la France. On ne tue pas la mémoire, on ne bâtit rien sur l’oubli et le mensonge. Que cette dame reçoive notre juste gratitude. Il nous faut enseigner la vérité, brandir la mémoire et faire le lien entre le passé et l’avenir », a déclaré Michel Lugassy-Harel.
Pour Bernard Guilhem, « ma grand-mère était en avance sur son époque car elle pensait que les femmes pouvaient être autonomes. Elle était discrète sur ses actions passées et la famille évoquait peu ce qu’elle avait fait. » Bernard Guilhem a reçu en cadeau un olivier, arbre de la paix. Les frères Frank en ont planté en Israël, en souvenir de cette journée. À Tourtoirac, en hommage à Jeanne Guilhem, une gerbe a été déposée au monument aux morts.
Au cours de la cérémonie, la Quinte du Loup a interprété trois chants : « Quand les hommes vivront d’amour », chant québécois, écrit durant la guerre d’Algérie ; « Le chant des marais », hymne de la déportation ; « Au nom des enfants ». A l’issue de la cérémonie, les deux hymnes, français et israéliens ont été écoutés.
Signée Nathan Karp, la médaille est l’expression à la fois artistique et symbolique de la phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l’Univers tout entier».

 

source: http://www.lenouvelliste.fr/actualite/Bussiere-Galant-:-Jeanne-Guilhem,-Juste-parmi-les-Nations-824.html du 12/06/2012