Les Justes
Pierre Auguste André
Année de nomination : 2009Date de naissance : 16/07/1904
Date de décès : 13/05/1959
Profession : Gendarme
Département : Yonne
Région : Bourgogne-Franche-Comté
Personnes sauvées
Lieu porteur de mémoire
Cérémonies
L'histoire
Henri Resnick et sa femme Anna-Bella étaient des émigrés polonais naturalisés français en 1922. Leur fille Marguerite était née en 1908 et Yvette en 1919.
En juillet 1942, la chasse aux Juifs commença à Nancy. Henri et Anna-Bella refusèrent de quitter leur maison, mais Marguerite, son mari Sam Spiegel, leur fils Jean-Maurice et Yvette s’enfuirent et passèrent la ligne de démarcation après un certain nombre de tentatives infructueuses. Ils s’installèrent à Pallauau-sur-Indre dans l’Indre, à quelque quarante kilomètres au nord-ouest de la capitale régionale, Châteauroux. Ils louèrent un appartement chez une femme qui croyait qu’ils étaient des « évacués » de Lorraine.
En avril 1943, un policier local et une postière prévinrent la famille que le chef de la police, Monsieur Givelet, s’était renseigné auprès de l’administration de Nancy pour savoir qui ils étaient et qu’ils couraient le risque d’être arrêtés. Yvette se précipita chez le commissaire de police qui lui dit brutalement de quitter les lieux dans les quarante huit heures. Un ami de son beau-frère Ernest Petit, la mena chez Pierre André, gendarme à Toucy dans l’Yonne, qui accepta de trouver un hébergement pour la famille. Pierre André, membre de la Résistance locale, les installa dans une baraque vide au fond des bois près d’un hameau voisin et parla de la famille à un ami proche, le secrétaire de la mairie, Michel Martiré. Pierre André et Michel Martiré s’occupèrent du bien-être et de la sécurité de la famille juive, y compris en donnant de fausses informations aux autorités.
Une fois de plus, Yvette essaya de persuader ses parents de les rejoindre, mais ils refusèrent de quitter leur maison. Anna-Bella fut arrêtée en août 1943, déportée et assassinée à Auschwitz. Henri fut caché par un ancien employé du cimetière voisin. Il arriva à Toucy deux jours plus tard et Pierre André le prit en charge pour l’amener chez ses filles.
En décembre 1943, la menace de dénonciation prit de l’ampleur et Michel Martiré déménagea les Resnick-Spiegel dans une ferme isolée à Champignelles. Il leur fournit des faux papiers d’identité et des cartes d’alimentation et s’assura que leurs noms ne figuraient pas sur les registres locaux. Les cinq refugiés juifs restèrent là jusqu’à la Libération de la région.
Après la guerre, Yvette Resnick resta en contact avec les familles André et Martiré.
Le 21 janvier 2009, Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah a décerné, à Monsieur Pierre André et à Monsieur Michel Martiré, le titre de Justes parmi les Nations.
Le témoignage
Michel Martiré est secrétaire de mairie à Toucy et père de sept enfants. Pierre André est brigadier de gendarmerie à Toucy. Les Resnick sont originaires de Pologne. Aria Resnick, né en 1885, à Pinsk, épouse à Varsovie, Anna Bella née Kleidman le 24 mai 1885 à Ruda-Opalnie (Pologne). Ils partent à Paris rejoindre un oncle d’Anna. Aria est maroquinier. En 1910, Edmond Bechmann, un industriel, propose à Aria un emploi dans une usine de velours à Blâmont (Meurthe-et-Moselle). En 1914, Aria Resnick est engagé volontaire pendant la guerre. Il sera Grand Invalide de Guerre (amputé d’une jambe) et nommé Officier de la Légion d’Honneur. Aria et Bella Resnick ont deux filles, Marguerite née en 1908 et Yvette née en 1919. Ils sont naturalisé français en 1922. En 1936, Marguerite épouse Samuel Spiegel, né en 1905 à Vaslui en Roumanie. Leur fils, Jean-Maurice, naît le 29 août 1939. Yvette Resnick est Normalienne avec l’ambition d’intégrer Normale Supérieure.
En juin 1942, après la grande rafle à Nancy, décide Samuel Spiegel à fuir en zone sud, avec sa famille. Aria Resnick et Bella refusent de partir, ils ont confiance en Pétain. Samuel et Marguerite décident d’emmener avec eux Yvette. Munis de fausses cartes au nom de « Lecoutre », ils passent en zone sud et vont rejoindre des membres de leur famille dans l’Indre à Palluau. En avril 1943, avertis par un gendarme, ils apprennent qu’une enquête les concernant a été envoyée à Nancy. La postière retarde ce courrier, ce qui donne le temps à Yvette, 24 ans, de s’y rendre, malgré le danger. A Nancy, elle rencontre un commandant de gendarmerie qui lui dit : « Il faut partir dans les 48 heures ». Yvette joint Ernest Petit, un ami de son beau-frère Samuel Spiegel. Celui-ci la dirige vers Pierre André, un ami qu’il a connu lors de son service militaire, brigadier de gendarmerie à Toucy (Yonne) en zone occupée. Pierre André est également lorrain. Le 1er mai 1943, Pierre André la reçoit chaleureusement à Toucy et se charge de trouver un hébergement pour la famille, pendant qu’Yvette va chercher les siens, restés à Palluau. Pierre André leur trouve un logement sommaire à l’écart de la ville, au lieu dit « Les Guerriers » appartenant à la ferme voisine et les introduits auprès du secrétaire de mairie, Michel Martiré, père de six enfants engagé dans la résistance. Michel Martiré donne une carte de travail à Samuel, au nom de « Simon Noël Lecoutre », et des cartes et des tickets d’alimentation pour toute la famille. Pierre André et Michel Martiré veillent désormais ensemble sur Yvette Resnick et sa famille. Apprenant que la milice recherche Samuel Spiegel, Michel Martiré effectue plusieurs faux changements de domicile pour brouiller les pistes et Pierre André envoie un gendarme avec un message codé pour les prévenir. Après l’arrestation de Anna Bella, son épouse, le 13 août 1943 à Blamont, Aria Resnick parvient à rejoindre ses enfants. Anna Bella, sera déportée sans retour de Drancy vers Auschwitz par le convoi n° 61 du 28 octobre 1943. Son arrivée soudaine provoque la méfiance de propriétaire de la ferme voisine. Il faut partir à nouveau. Ils fuient, orientés par Michel Martiré vers une ferme isolée, « Le Petit Etang Neuf ». Jean-Maurice Spiegel alors âgé de 4 ans, se souvient du bruit de la moto du brigadier, venu apporter des informations. Il a assisté à des discussions après 1945, entre ses parents et Pierre André, qui lui ont permis de comprendre le rôle important joué par cet homme, simple et honnête, dans le sauvetage de sa famille.
Exposition: Désobéir pour sauver
Documents annexes
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