Dossier n°12416 - Juste(s)

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Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d'honneur ainsi qu'une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël. Au 1er janvier 2021, le titre avait été décerné à 27921 personnes à travers le monde, dont 4150 en France. Cependant le livre des Justes ne sera jamais fermé car nombreux sont ceux qui resteront anonymes faute de témoignages.Reconnus ou non, ils incarnent le meilleur de l'humanité. En effet, tous ont considéré n'avoir rien fait d'autre que leur devoir d'homme. Ils serviront de phares et de modèles aux nouvelles générations.

Allée des Justes à Paris
Allée des Justes à Jérusalem

Les Justes

Henri Fournier

Année de nomination : 2012
Date de naissance : 22/02/1886
Date de décès : 07/01/1967
Profession : Agriculteur

Lydie Henriette (Issartial) Fournier

Année de nomination : 2012
Date de naissance : 10/04/1888
Date de décès : 16/11/1956
Profession : Agricultrice
    Localisation Ville : Tence (43190)
    Département : Haute-Loire
    Région : Auvergne-Rhône-Alpes

    L'histoire

    Le père d’Itshak, Israël Yehouda Michaëlovitch est né à Strykow en Pologne en 1899. Sa mère, Malka née Rosenberg est aussi née en Pologne en 1884. Pour des raisons économiques, le père est venu en France en 1929 et sa famille l’a rejoint en 1932.

    Itshak Michaëli est né lui aussi à Strykow en 1922 et il avait 10 ans quand il est arrivé en France. La famille était religieuse et le père travaillait comme boucher ritualiste dans les abattoirs de viande casher.

    Deux semaines après  le début de la guerre, Itzhak va en Normandie accompagné d’un de ses amis du nom de Marc Rozenblum pour travailler dans les champs à la place des agriculteurs qui avaient été mobilisé. Puis ils vont près de Valence dans le cadre d’un groupe de la « Shomer Hatzahir » (mouvement de jeunesse juive) en novembre 1939 et y restent jusqu’à la fin juin 1940.

    Pour eux, cette expérience fait partie d’une formation agricole qui leur servira une fois qu’ils iront s’installer en Palestine à la fin de la guerre qu’ils pensent courte.

    Suite à la défaite de la France en juin 1940, le groupe se disperse. Itshak est envoyé à Moissac. Il intègre un orphelinat pour des enfants âgés de 7 à 16 ans. Au départ, il travaille dans les champs puis comme animateur chez les plus jeunes.

    En 1941, sa principale activité est d’enseigner le judaïsme aux enfants et les préparer à leur Bar Mitzva.

    Pendant l’été 1942 la police française vient à l’orphelinat pour arrêter les jeunes de plus de 16 ans et spécifiquement ceux ne possédant pas la nationalité Française. Itshak parvient à s’enfuir avec l’aide du directeur de l’orphelinat et pendant près de deux mois, il erre de cachette en cachette via les réseaux des éclaireurs juifs de France (E.I.F)

    Il parvient à la frontière Suisse et là, rencontre un de ses professeurs de l’école Maïmonide à Paris d’avant la guerre. Le professeur l’engage pour qu’Itshak l’aide à faire passer des groupes d’enfants en Suisse.

    Celui-ci s’acquitte de sa mission pendant un certain temps jusqu’à ce qu’il soit arrêté et envoyé au camp de Rivesaltes.

    Après un mois et demi, il en sort grâce à la résistance juive qui a envoyé un « télégramme officiel » falsifié demandant au commandant du camp de le libérer. Il est envoyé aussitôt par la résistance dans la région de Limoges pour être animateur dans un orphelinat du nom de Montintin. Il dirige des ateliers de judaïsme et d’éducation physique. Puis il retourne à Moissac jusqu’à la dispersion de l’orphelinat en 1943. Itshak est envoyé dans une institution nommée « Midreshet Haneviim » (enseignement des prophètes) qui se trouve dans la ferme « Istor » à Chaumargeais. Cette ferme appartient aux Fournier et il y restera jusqu’à la fin de la guerre.

    Pendant ce temps, ses parents et son petit frère se cachent à Paris. Après l’occupation de la zone libre par les allemands, ils vont sur Lyon où ils resteront jusqu’à la fin de leurs vies. Le petit frère est dirigé vers Moissac puis passe en Suisse où il restera jusqu’à la fin de la guerre.

    Qu’est ce qu’était la « Midreshet Haneviim ». L’initiateur du projet s’appelle Georges Levitte, un intellectuel qui sera le directeur de la collection Aleph aux éditions de minuit. Dans le livre de Gérard Israël « Heureux comme Dieu en France » édité chez Robert Laffont en 1975, cette institution est mentionnée comme ayant été créée par des animateurs de l’orphelinat de Moissac page 223.

    « Créer une nouvelle élite intellectuelle, une génération capable d’enseigner aux survivants…les principes du judaïsme. Permettant la continuité…pour des dizaines de milliers de Français (de divers maquis) qui auront abandonné les armes, parmi eux de nombreux juifs.  Mais, personne ne s’est engagé dans la résistance morale. Nous devons nous isoler pour apprendre le judaïsme comme le fit à l’époque le rabbin Johanan Bar Zachaï, alors que le temple de Jérusalem était dévasté par les romains. Nous devons apprendre, comment enseigner. »

    Dans l’ouvrage de Catherine Lewertowski sur les enfants de Moissac, on peut lire le témoignage d’Itshak qui raconte les études à ciel ouvert.

    « C’était un moment spirituel très fort par rapport à ce que nous vivions dans un monde en plein chaos au milieu des explosions et des cris. »

    Cette institution se trouve sur la propriété des Fournier, qui en plus du lieu leurs fournissent des vivres. Certes ils aident pour les travaux de la ferme, s’occupent du bétail et du poulailler mais la famille Fournier y compris leurs fils de huit ans font tout pour que rien n’arrive à leurs pensionnaires et que leurs vies soient préservées.

    Le fils Fournier, raconte dans son témoignage que l’isolement de la Ferme permet à ce que personnes ne se posent de questions.

    Lors du discours prononcé par Francis Weil lors de l’inauguration de la plaque sur la Ferme des Fournier, il fait un jeu de mots entre le nom de la ferme « Istor » et le mot en hébreu « Izkor » qui veut dire souvenir. Il souligne aussi que comme les enfants étaient cachés, ils n’avaient pas de tickets d’alimentation et donc furent nourris par les produits de la ferme. Les Fournier auraient pu revendre les surplus au marché noir, mais ils préfèrent les donner aux enfants qu’ils ont pris sous leur protection. Eux-mêmes sont des membres de la résistance et donc sont renseigné sur des rafles  de la police française ou des allemands permettant aux jeunes à ce moment de se cacher dans les forêts avoisinantes.

    Le 3 juillet 2012 Yad Vashem – Institut International pour la Mémoire de la Shoah, a décerné à Monsieur Henri Fournier et son épouse Lydie, le titre de Juste parmi les Nations.

    Documents annexes

    Témoignage de Pauline JACON, Arrière-petite-fille d’Henri et Lydie FournierTémoignage de Pauline JACON, Arrière-petite-fille d’Henri et Lydie Fournier

    Articles annexes




    Mis à jour il y a 8 mois.