Alfred et Augustine, Justes parmi les Nations – Douarnenez
Publié le 04/07/2013
Le dimanche 7 juillet, Alfred et Augustine Le Guellec recevront, à titre posthume, la médaille de Justes parmi les Nations décernée par l’institut Yad Vashem de Jérusalem.
C’est leur nièce, Aline billon, qui les représentera pour recevoir, entourée des nombreux autres neveux et petits-neveux, cette distinction remise par le représentant de l’ambassade d’Israël en France, Michel Lugassy-Harel. Une reconnaissance demandée par Régine Studnik, sauvée par le couple Le Guellec, avec sa fille Dora et son mari Marcel, le 16 juillet 1942, jour de la terrible rafle du Vel’d’hiv. Aujourd’hui âgée de 95 ans, Régine Studnik, accompagnée de sa fille Dora, sera présente à la cérémonie. Une plaque sera également dévoilée, à 14 h 30, place Saint-Jean (près de la stèle Max Jacob), en hommage aux Justes parmi les Nations de Douarnenez. Le nom d’Yves Criou y figurera aux côtés de celui d’Alfred et Augustine Le Guellec.
De Pouldavid à Paris
Issu d’une famille d’artisans de Pouldavid, le jeune Alfred effectue ses études à Saint-Blaise et au petit séminaire de Pont-Croix. Élève brillant, titulaire d’un premier prix de philosophie, il obtient son baccalauréat en 1911. Il poursuit ses études de droit à Paris et entre au Ministère de la guerre. Engagé volontaire dans la guerre 1914-1918, il est gravement blessé à la bataille de Dixmud. En 1920 il entre à la Préfecture de Police de Paris où il gravira les échelons de l’administration jusqu’à occuper un poste clef au service des étrangers.
Copains de régiment
De par ses fonctions au sein d’un service qui suit les dossiers des étrangers, au premier rang desquels les juifs apatrides (déchus de la nationalité française), Alfed et Augustine Le Guellec vont aider des familles juives à s’enfuir, à se cacher. « Un jour, ils se sont retrouvés à 23 dans son petit appartement » se souvient sa nièce par alliance, Jeanne Guellec, 89 ans, ancienne commerçante, qui réside à Douarnenez. Mais quel lien entre le fonctionnaire d’origine bretonne, catholique, et le couple Studinik qui milite chez les FTP-Moi, proche du réseau Manouchian. En apparence deux mondes bien éloignés. En fait Marcel et Alfred s’étaient connus au régiment. Déjà en 1941, Alfred avait fait jouer ses relations pour libérer son ami d’origine polonaise du camp de Beaune-la-Rolande.
À l’aide d’une corde
Le 15 juillet 1942, Informé qu’une arrestation de grande ampleur de juifs se prépare pour le lendemain, il avertit tous les porteurs de l’étoile jaune qu’il rencontre et se précipite chez son ami Marcel qui est immédiatement caché par son réseau militant. Le lendemain, c’est la grande rafle du Vel d’Hiv qui verra l’arrestation de 13 152 personnes, dont pour la première fois les femmes et les enfants. Régine Studnik parvient à s’enfuir de son appartement en glissant le long d’une corde (qui sert à monter les charges), et se réfugie dans le café voisin où la serveuse lui prête sa blouse. Elle a laissé sa fille Dora dans l’appartement et c’est Augustine Le Guellec, qui ira la chercher en pleine rafle, pour ensuite cacher le couple d’amis dans une chambre de bonne.
Tante Augustine
Alfred et Augustine n’ont pas eu d’enfants. Alfred est décédé à l’âge de 58 ans tandis qu’Augustine a vécu jusqu’en 1977. Elle venait régulièrement en vacances à Douarnenez, se souvient sa nièce, Andrée Guellec, professeur d’histoire agrégée aujourd’hui en retraite : « elle n’en parlait jamais, pour elle c’était normal, ils avaient fait ce qu’ils avaient à faire ». Un sens du devoir qui n’appelait aucune récompense. Un autre Juste parmi les Nations, aux origines familiales Douarnenistes, Roger Belbeoc’h, n’a t-il pas écrit en un livre paru en 2006 aux éditions Robert Laffont Je n’ai fait que mon devoir, 1940-1944.
Article lié au Dossier 12266