Les Mallet, Justes de Lupersat
Lupersat dans la Creuse (Ph. BCFYV / DR).
Pendant 8 mois
des années les plus noires
Victor et Pauline Mallet
ont abrité au risque de leur vie
André et Gilbert Getraide
Ce dimanche 25 avril, la volonté de deux anciens enfants juifs cachés à Lupersat s’est enfin concrétisée. Volonté de voir reconnaître et honorer – même à titre posthume – les époux Mallet qui, à partir de décembre 1942, les accueillirent dans leur famille de six enfants…
Cette cérémonbie s’est tenue dans la salle polyvalente de Lupersat. Elle avait été préparée par Natan Holchaker, Délégé régional du Comité français pour Yad Vashem.
Synthèse du dossier Yad Vashem :
– « Chemya Getrajda et son épouse Rosa, originaires de Pologne, arrivent d’Allemagne à Paris en 1934.
Chemya ouvre un atelier de maroquinerie, aidé de Rosa, dans leur appartement 104, rue Amelot, dans le 11e arrondissement de Paris.
Gilbert naît le 23 avril 1936 et André le 16 septembre 1937.
Le 14 mai 1941 les Juifs étrangers sont convoqués individuellement, pour un « examen de situation ». La lettre de convocation précise que la personne qui ne se présenterait pas aux jours et heures fixés, s’exposerait aux sanctions les plus sévères. Ceux qui répondent à cette injonction ne seront pas libérés.
3 710 hommes sont ainsi arrêtés. Parmi eux se trouvent 3 430 Juifs polonais.
Chemya Getrajda, 49 ans, né le 23 janvier 1892 à Varsovie (Pologne) fait partie de ceux-là. Il est interné et sera déporté sans retour de Drancy vers Auschwitz par le convoi n° 7 du 19 juillet 1942.
Le 16 juillet 1942, Rosa et ses deux enfants échappent de justesse à la rafle du Vélodrome d’Hiver. 9 000 policiers et gendarmes rafleront 13 152 juifs à Paris et en banlieue parisienne.
Rosa et ses enfants, cachés chez des amis à Paris, parviennent ensuite à se réfugier en zone sud, avec l’aide d’un passeur. Ils arrivent à Moulins où un commissaire de police bienveillant conseille à Rosa d’aller à Mainsat (Creuse). Ils y resteront de septembre à décembre 1942.
En décembre 1942, Rosa trouve une famille prête à accueillir ses deux enfants, âgés de 5 et 6 ans, près de Mainsat.
Victor et Pauline Mallet ont une maison dans le village de Lupersat qu’ils occupent avec leurs 6 enfants. Ils accueillent chaleureusement les deux petits Juifs, en toute connaissance de cause, et les présentent comme leurs neveux.
Rosa remet à Victor et à Pauline une modeste pension pour subvenir aux besoins de ses enfants et réussit à rejoindre Nice, puis la Savoie pour organiser son départ avec ses enfants en Suisse.
Pour ne pas attirer l’attention des voisins, Victor et Pauline emmènent les enfants à l’église le dimanche.
Toute la famille s’occupera avec dévouement d’André et Gilbert durant 8 mois.
Les enfants sortent peu de la maison et jouent dans la cour sous la surveillance de Marie, la fille de Victor et Pauline qui a 19 ans. André Mallet, qui avait 12 ans à l’époque, se souvient que les enfants se cachaient sous le lit lorsque les gendarmes s’approchaient de la maison.
En juillet 1943, Rosa entre en contact avec une jeune monitrice de la maison d’enfants de Limoges. Elle vient chercher les deux enfants chez les Mallet et les convoie jusqu’à la gare de Limoges, puis à Saint-Gervais où ils rejoignent leur mère. Ils parviendront à passer en Suisse, où ils resteront tous les trois jusqu’à la Libération. »
Albert et André Getraide à Lupersat (Arch. BCFYV / DR).
André Detraide :
– « Après guerre, nous ne savions même pas le nom de nos sauveurs. Notre seul indice était une photo de Gilbert et moi, en compagnie d’une dame et d’un bébé devant une maison en pierre.
Au dos de la photo, il était inscrit : Lupersat 25/04/1943. »
Catherine Perrot :
– « Après plusieurs années de recherches, André Getraide et son frère Gilbert ont fini par retrouver leurs bienfaiteurs et ont tenu à ce qu’ils soient récompensés. « Ils nous ont sauvé la vie », confie simplement André Getraide (…).
C’est grâce à l’abbé André Binon, qui officie à Lupersat depuis 1946, qu’ils ont pu retrouver la trace de Victor et Pauline Mallet et de leurs six enfants (…).
La mère d’André et Gilbert parlait peu des événements vécus par la famille pendant la guerre, après la déportation de son mari à Auschwitz en juillet 1942. Les deux frères savaient seulement qu’ils avaient été cachés en zone libre, à Mainsat, de septembre à décembre 1942 et à Lupersat, de décembre 1942 à juillet 1943… »
(La Montagne).
Sous-titre de La Montagne (DR).
NB : Nos remerciements au Délégué régional du Comité Français pour Yad Vashem, Natan Holchaker dont les documents ont permis la rédaction de cette page.
Article lié au Dossier 11501