Les Justes Pierre et Zoé de Chabot

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Dossier n°

Les Justes Pierre et Zoé de Chabot

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Entre Paris
et la Sarthe
Micheline et Béatrice Lebovici
échappèrent à la Shoah

Le calendrier en date de ce dimanche 18 avril portait la remise à titre posthume de la Médaille et du Diplôme de Justes parmi les Nations à Pierre ainsi qu’à Zoé de Chabot. Fixée dans un cadre familial, cette cérémonie réunit à nouveau l’ayant droit des nouveaux Justes, Clotilde de Chabot de Tramécourt et son amie depuis la chasse aux juifs, Béatrice Lebovici (soeur de feu Serge Lebovici, psychiatre de renom).
Michel Harel, Ministre aux Affaires administratives, représentait l’Ambassade d’Israël.
Le Comité Français pour Yad Vashem était en nombre avec Louis Grobart, Vice-Président et deux de ses Délégués régionaux, Régine Sigal et Jean-Claude Roos.

Synthèse du dossier Yad Vashem :

– « Solo Lebovici, d’origine roumaine, et Caroline Rosenfeld, née à Paris, se marient en 1913.
Le couple habite avenue Mac Mahon dans le 17e arrondissement.
Trois enfants sont nés dans ce foyer : Serge en 1915, Micheline en 1919 et Béatrice en 1923.
Solo Lebovici est dermatologue, il soigne les membres de la famille de Chabot.

Quand les Allemands frappent à la porte de son domicile Solo ( Salomon ) Lebovici n’est pas trop inquiet. Il a participé à la guerre de 1914-1918, il est décoré de la Légion d’Honneur et de la Croix de Guerre. Son héroïsme d’alors ne pèse évidemment pas aux yeux des occupants qui procèdent à son arrestation.

Par sa présence d’esprit, il sauve alors son épouse présente dans l’appartement, en martelant :
« C’est ma maîtresse, elle n’est pas juive ».
Par bonheur, Serge n’habite déjà plus chez ses parents, Micheline et Béatrice sont dans la Sarthe chez des amies.

Solo Lebovici est déporté, assassiné.

Serge prévient immédiatement ses sœurs, leur conseille de se rendre, par quelque moyen que ce soit, au Parc Soubise, propriété des de Chabot, à Mouchamps, en Vendée.
Ces jeunes filles de 19 et 23 ans, parviennent au Parc Soubise, affolées.
Timides et émues, elles sont accueillies par ces mots :
« Et bien, vous voilà enfin, on vous espérait depuis longtemps…
Nous avons ici, pendant ces vacances, beaucoup de cousins de votre âge, vous serez parmi eux. »

Les enfants de Chabot, Clotilde, Jeanne et Charles ont pour recommandation de faire passer les jeunes juives pour des amies du cours Dupanloup.

Clotilde de Chabot, Béatrice Lebovici ont le même âge, elles deviennent amies et le sont toujours.

À la fin du mois de septembre, Béatrice et Micheline quittent la propriété, sachant que Pierre et Zoé de Chabot les auraient volontiers gardées.
Elles rejoignent leur mère à Loué, dans la Sarthe. Elles sont munies de papiers au nom de Lebovic.

Béatrice et Clotilde échangent une correspondance assidue, heureusement conservée par Clotilde de Chabot. Ces lettres sont les témoins précieux d’une tranche de vie.

Bravant les interdits, Béatrice Lebovici a le courage de venir à Paris passer une licence de Lettres. Elle est aujourd’hui Chevalier de la Légion d’Honneur et Inspectrice retraitée de l’Education nationale. »

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Le Parc Soubise bien après les années de guerre (Ph. BCFYV / DR).

Michel Guilloux :

– « Solo Lebovici, médecin roumain arrivé à Paris au début du siècle, ancien des tranchées de Verdun, sera capturé par la Gestapo au printemps 1942, emprisonné au camp de Pithiviers avant d’être déporté à Auschwitz, d’où il ne reviendra pas. Dans un ultime réflexe, comme le rapporte Élisabeth Roudinesco dans son Histoire de la psychanalyse en France (Fayard), il sauvera la vie de sa femme, Caroline Rosenfeld, en la présentant comme une maîtresse d’occasion. »
(L’Humanité, 19 août 2000).

Emilie Cailleau :

– « Je les ai trouvés ». Marie-Astrid de Chabannes pointe du doigt les inscriptions de « Pierre et Marie-Zoé Chabot » dans la roche calcaire. Cette étudiante de 21 ans éprouve une immense fierté de découvrir le nom de ces arrières-grands parents. Le sourire jusqu’aux oreilles et les cheveux blonds en bataille, la Parisienne est très émue.
Elle non plus ne connaissait pas l’histoire de ses aïeux, avant que sa mère ne la lui raconte un an plus tôt. Dans son sac rose, elle exhibe fièrement le livre fait par sa mère. Un recueil de témoignages, photos, lettres et autres archives qui a permis à ses arrières grands-parents d’être honorés de la fameuse distinction des Justes.
Sur la couverture bordeaux, une vieille photo en noir et blanc des Chabot. Elle, majestueuse dans sa robe à fleurs semble danser main dans la main avec son mari. C’est ce couple heureux qui a hébergé à l’été 42, Micheline et Béatrice, deux soeurs juives pourchassées pendant l’Occupation.
Béatrice vit aujourd’hui dans la Sarthe (…). Elle a écrit à la mère de Marie-Astrid en 1997:
« Voici 55 ans que ma soeur Micheline et moi avons trouvé à Mouchamps la porte ouverte, l’apaisement et la générosité », lit-on.
Une correspondance qui a permis aux Chabot de recevoir à titre posthume la médaille des Justes. »
(Reportage sur le voyage en Israël de vingt descendants de Justes, une initiative de la Fondation France-Israël.
L’Express.fr, 18 avril 2010).

NB : Nos remerciements à Régine Sigal pour le relais entre la cérémonie et cette page.